Une montée des eaux
Une montée des eaux
Si la température augmente, les glaces peuvent se mettre à fondre et alimenter ainsi l’océan en eau douce. La fonte de la banquise ne modifiera en rien le niveau des mers car, selon le principe d’Archi- mède, la glace occupe dans l’eau exactement le volume qu’elle aurait une fois fondue. Pour la même raison, la disparition des glaçons dans un verre rempli à ras bord n’entraîne pas de débordement, contrairement à ce que suggère l’intuition. Mais il n’en est pas de même pour les glaces portées par les continents, glaciers de montagne ou calottes polaires. Leur fonte alimente les fleuves et rivières qui se déversent ensuite dans les océans. De plus, l’élévation du niveau de la mer peut accélérer la formation d’icebergs qui contribuent également à l’augmentation du volume d’eau des océans. L’eau qui résulterait de la fonte de la totalité des glaces stockées sur le continent antarctique, répandue uniformément sur la surface des océans, élèverait le niveau des mers de 70 mètres. En comparaison, la fonte des glaces du Groenland entraînerait une élévation de 7 mètres, celle des glaciers de montagne une hausse de 35 centimètres seulement. Mais nous sommes loin de craindre des scénarios aussi catastrophiques.
Même si le réchauffement devait atteindre une dizaine de degrés aux hautes latitudes, le thermomètre resterait bien en-deçà du seuil critique de fonte de la glace sur la majeure partie du continent antarctique, où régnent actuellement des températures de -20 °C sur la côte et -50 °C à l’intérieur des terres. Bien au contraire, il est fort probable que le réchauffement serait accompagné de précipitations de neige plus abondantes sur l’Antarctique. La calotte glaciaire, loin de fondre, se mettrait alors à prendre du volume. Cette neige supplémentaire provenant essentiellement de l’évaporation des océans, abaisserait le niveau des mers d’autant. A plus long terme, par contre, à l’échéance de quelques siècles, le risque d’une débâcle partielle de la calotte antarctique ne pourrait être complètement écarté. En particulier, la déstabilisation de la façade du continent antarctique tournée vers l’Amérique est souvent évoquée. Reposant en grande partie sous le niveau de la mer, elle pourrait être plus sensible à un réchauffement persistant. Les glaces pourraient se mettre à glisser sur le sol sous-jacent, qui présente peu de reliefs pour les retenir, et déverser d’énormes icebergs dans les mers australes, causant une élévation de 5 mètres du niveau de mers, de quoi recouvrir de nombreuses régions habitées. Quoi qu’il en soit, il reste difficile de prévoir si un tel scénario est fortement probable ou non dans le futur et quand il pourrait advenir car nos connaissances de la dynamique des glaces sont encore très limitées.
Nos estimations des variations récentes du niveau des mers restent entachées d’incertitudes car nous ne disposons que d’un nombre restreint de séries complètes de mesures convenablement distribuées sur le globe. De plus, aux variations du niveau général des mers s’ajoutent de nombreux effets locaux qui biaisent les mesures : affaissement de régions côtières sous le poids des sédiments ou causé par le pompage intensif de nappes d’eau ou de pétrole, variations locales du niveau marin dues à des effets tectoniques. Nombreux sont les phénomènes qui modifient le niveau relatif des mers et par conséquent le tracé des lignes de côtes sans pour autant affecter le niveau global des océans. Le socle de la Scandinavie, par exemple, continue à remonter depuis la fonte des glaces consécutive à la fin de la dernière glaciation. Ce processus de réajustement isostatique se fait en réponse à l’enfoncement du sol provoqué par le poids des glaces. Il résulte de l’élasticité des couches plus profondes sur lesquelles reposent les continents. Dans cette région, on observe une baisse relative du niveau marin qui atteint au moins 50 cm par siècle.
La montée des eaux n’a aucune raison de cesser en 2100. Un siècle plus tard, nous risquons d’être confrontés à une élévation d’un mètre par rapport au niveau actuel. Cependant, la marge d’incertitude est grande : elle dépend aussi bien du rythme d’émission des gaz à effet de serre que du temps de réponse de l’océan à la perturbation induite par l’activité industrielle. Le temps de brassage des océans est en effet très long et se compte en centaines ou en milliers d’années. Même si la concentration des gaz à effet de serre était stabilisée à une valeur constante, l’océan poursuivrait son lent réchauffement pendant encore de nombreuses années.
Quelles pluies pour demain ?
Le réchauffement climatique ne saurait se réaliser sans- une altération du régime des pluies : une augmentation de la température favorise l’évaporation à la surface des océans et entraîne en compensation des précipitations plus importantes en moyenne sur le globe. Néanmoins, toutes les régions ne sont pas soumises à ces changements de manière équivalente et tout le problème réside dans la prévision des effets régionaux.
Il faut préciser à ce propos que suivant les modèles, les prévisions sont variables. Les modèles découpent la surface du globe en «boîtes» élémentaires relativement grandes, de 250 à 500 km de côté, à l’intérieur desquelles on ne considère qu’une valeur moyenne des températures, précipitations et vents. La France, par exemple, est partagée en quatre ou au maximum huit boîtes, représentées chacune par un seul point de grille du modèle. Avec un tel découpage du globe, les grandes chaînes de montagnes sont très «émoussées». Le massif de l’Himalaya, dont l’altitude est moyennée à l’intérieur de chaque boîte, est lissé à un niveau de 5000 m et la barrière des Andes, écrêtée, culmine à 1500 m. Il s’ensuit une représentation imparfaite des caractéristiques climatiques régionales, surtout pour les pluies qui sont très sensibles à la présence de barrières montagneuses. De plus, par rapport à la complexité des processus mis en jeu dans la nature, les modèles représentent d’une façon souvent très schématique les phénomènes météorologiques, ou météores, qui produisent la pluie.
Dans un monde plus chaud, les modèles s’accordent à prévoir des pluies plus abondantes dans les régions tropicales et aux hautes latitudes. En particulier, la mousson indienne pourrait être plus intense : poussé par un contraste thermique renforcé entre le continent et l’océan, l’air marin devrait pénétrer davantage à T’intérieur des terres et y décharger son excédent d’humidité sous forme de pluies torrentielles. Mousson plus faible dans les périodes de glaciation, plus intense pendant les périodes les plus chaudes, le passé témoigne en effet de la grande sensibilité de ce météore aux changements climatiques .
Réchauffement et changements dans la répartition des pluies auront des répercussions sur les écosystèmes. Un déplacement des zones de végétation vers le pôle est le scénario le plus probable. On estime que les forêts pourraient migrer progressivement de 100 km par degré de réchauffement global moyen. L’étude des climats passés nous montre que les écosystèmes, am ,i que les animaux et les hommes, peuvent s’adapter à des changements climatiques. Mais, dans le cas présent, la rapidité de l’évolution pourrait entraver leur adaptation. De plus, soumis au stress climatique, les arbres et les plantes pourraient devenir plus vulnérables aux pollutions locales, comme les pluies acides. C’est d’ailleurs ce qui semble s’être produit après les sécheresses de 1976 et 1983 en Europe, conduisant à une détérioration profonde des forêts des Vosges, de l’Allemagne orientale et de la Pologne.
En contrepartie, la concentration du gaz carbonique peut agir directement sur les écosystèmes en facilitant la photosynthèse. Dans un milieu plus riche en gaz carbonique, la croissance de certaines plantes est activée. Mais dans quelle mesure ce processus contrebalancera-t-il les effets négatifs d’un réchauffement rapide ?
Vidéo : Une montée des eaux
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