Cobes
Les trois cobes stricto sensu sont le cobe onctueux (Kobus ellipsiprymnus), le cobe de Buffon (K. kob) et le poukou (K. var- doni). Le plus grand de toute la tribu est le cobe onctueux (ou cobe à croissant), qui atteint de 150 à 250 kilos; hirsute et grisâtre, son pelage est imprégné d’une sécrétion grasse et odorante ; c’est une bête lourde dotée d’un grand cornage évasé. Le cobe de Buffon et le poukou ont la taille d’un chevreuil, mais sont nettement plus massifs : leur poids oscille entre 50 et 120 kilos; les robes varient selon les sous- espèces, du fauve doré au chocolat; les cornes, lyrées, ont des pointes qui reviennent vers l’avant, celles du poukou étant plus courtes et plus épaisses.
Une évolution récente et explosive
Si les bovidés dans leur ensemble s’enracinent très loin dans le passé de l’Asie, il y a 35 ou 40 millions d’années, la plupart des antilopes sont d’apparition très récente en Afrique, où leur évolution a été explosive. C’est le cas des cobes et de leurs alliés, qui ne peuvent être âgés de plus de quelques millions d’années.
Les cobes n’occupent ni le désert, ni la grande forêt; ils sont répandus au sud du Sahara, et ils évitent le Namib. Le cobe onctueux occupait toute la zone possible ainsi définie, le cobe de Buffon les savanes au nord de l’équateur, et le poukou celles du Sud. Les deux cobes letchwés peuplaient deux régions de grands marais assez localisés, l’une au Soudan, l’autre en Afrique australe sur les cours de la Kafoué, du Zambèze et de POkawambo. Les trois «cobes des roseaux» vivent l’un dans les savanes du Nord, l’autre dans celles du Sud, le troisième dans les prairies d’altitude. Enfin, l’antilope-chevreuil, ou ribok (aussi rhe- buck), fréquente la zone au climat médi¬terranéen de l’Afrique du Sud.
Des individualistes qui commencent à s’organiser
Essentiellement paisseurs, un peu brouteurs, les cobes ont besoin d’une nourriture riche et de beaucoup d’eau. Chez le cobe onctueux, les mâles adultes sont territoriaux et très sédentaires (le territoire ne dépasse guère un seul kilomètre carré); les femelles et les jeunes mâles se regroupent en petites hardes lâches ; les femelles randonnent sur plusieurs territoires, sans qu’on puisse parler d’erratisme.
Chez le cobe de Buffon et chez le poukou, la sociabilité est plus grande, les femelles et les jeunes se réunissant éventuellement en troupeaux de plusieurs dizaines de têtes. Les mâles âgés ne sont territoriaux qu’au moment du rut, et, si la densité est élevée, les territoires de rut sont très réduits et proches les uns des autres. Ces deux espèces, également très sédentaires, parcourent au plus un kilomètre par jour. Les cobes fourragent le matin et le soir, et en début de nuit. Menacés, ils s’immobilisent avant de fuir en jaillissant; s’ils en ont la possibilité, ils se jettent à l’eau, où ils sont parfaitement à l’aise.
Des relations très libres
Les mâles territorialisés pendant le rut se livrent à des démonstrations pour repousser les mâles visiteurs ou en quête d’une place, et pour attirer les femelles en chaleur; ces dernières vont éventuellement de place en place, ou, si les territoires mâles sont regroupés en arènes de rut, elles parcourent l’arène en se laissant saillir par plusieurs mâles. Les femelles du cobe onctueux se reproduisent à un peu plus d’un an ; elles peuvent mettre bas tous les seize mois.
Chez le cobe de Buffon, les femelles peuvent mettre bas tous les dix mois, grâce à l’existence d’un œstrus postpartum (chaleurs consécutives à une mise bas). Les mâles sont sexuellement matures à un peu plus d’un an, mais ils ne peuvent s’accoupler qu’après plusieurs années, quand ils sont assez forts pour se ménager une place de rut.