Histoire du pétrole
Une place anecdotique jusqu’au xix siècle
Jusqu’au xixe siècle, la place du pétrole dans la société n’est qu’anecdotique.
Il est utilisé dans l’Antiquité, sous sa forme bitumineuse, comme produit pharmaceutique, cosmétique, ou pour renforcer l’étanchéité de la coque des navires. Il est aussi utilisé comme combustible pour les lampes à huile (les Mèdes l’utilisent comme combustible pour leurs armes de guerre) ou, en Egypte, pour embaumer les morts. Au Moyen Age, les Byzantins l’utilisent pour la préparation de leur feu grégeois, un mélange de naphte et de soufre, pour incendier les navires ennemis, tandis que les Indiens du Venezuela fixent la pointe de leurs flèches avec du bitume.
A la fin du xvir siècle, le Français Quinquet découvre la lampe à pétrole. Au milieu du «Xe siècle, le procédé du pétrole « lampant » est découvert, permettant d’obtenir une -amme claire et non odorante dans les lampes. pétrole, qui, au départ, n’est qu’un moyen d’éclairage, n’est extrait que modestement en Europe. La France s’y intéresse toutefois plus particulièrement. Ainsi, en Alsace, où il est récupéré par suintements dans les mines de Pechelbronn, on produira 4 000 tonnes entre 1812 et 1860.
Ce n’est donc pas le pétrole qui lance la révolution industrielle, mais le charbon. En effet, : est suite à la découverte de la machine à vapeur, en 1769, par l’Ecossais lames Watt je l’Angleterre se lance dans la révolution industrielle, suivie au cours des décennies servantes par les pays d’Europe occidentale. Le charbon est alors prédominant.
Le pétrole va prendre toute son importance à l’occasion de la découverte du moteur à explosion, inventé par le Belge jean-joseph Etienne Lenoir en 1860, puis du moteur diesel, dont le premier prototype fonctionnel fut réalisé par l’Allemand Rudolf Diesel en 1897. L’un et l’autre utilisent du pétrole, l’essence pour le moteur à explosion et le -azout (appelé fuel aux Etats-Unis) pour le moteur diesel.
Le pétrole dans la révolution industrielle
L’histoire du pétrole commence véritablement avec l’Américain Edwin Laurentine Drake, dit colonel Drake ». Celui-ci fut le premier à forer un puits pour trouver du pétrole : le 27 août 1859, il fait jaillir du pétrole à Titusville, au nord de la Pennsylvanie, d’une profon- Dejr de 23 mètres seulement, à l’aide d’un trépan suspendu au bout d’un câble. La région, du se multiplient désormais les puits de forage, prend bientôt le nom d’« Oil Creek ».
Edwin L. Drake, qui a exercé de multiples professions (employé dans un bateau, vendeur dans un magasin, conducteur de locomotives) a également suivi une formation de foreur en France, à Pechelbronn, et pris une participation dans une société d’exploitation d’huile minérale, la Seneca Oil Company. Malgré sa découverte, Drake finira misérablement, la Seneca Oil ayant été victime de l’absence de débouchés, faute de demande suffisante. Pourtant, le forage réalisé par Drake devait lancer la ruée vers le pétrole aux Etats-Unis, alors que l’amélioration des procédés de forage permet d’aller le chercher plus profondément.
En janvier 1870, la première grande compagnie pétrolière est créée par |ohn D. Rocke-feller: la Standard Oil. Elle allait rapidement dominer le marché pétrolier américain, parvenant en une décennie à en détenir le monopole en contrôlant 80 % du raffinage et 90 % des oléoducs, mais l’adoption d’une législation anti-trust aux Etats-Unis (Sherman Act) contraindra Rockefeller à démanteler en 1911 la Standard Oil en plusieurs compagnies Après les Etats-Unis, de nombreuses régions du monde connaissent une ruée vers l’or noir : la Russie, [‘Azerbaïdjan, l’Indonésie, le Venezuela, le Mexique, la Perse, la Mésopotamie…
C’est à cette époque que le Hollandais Henry Deterding fonde la Royal Dutch à partir de productions aux Indes néerlandaises (future Indonésie). Cette compagnie fusionnera en 1907 avec la compagnie de transport Shell de Marcus Samuel.
De son côté, le Britannique William Knox dArcy obtient du shah de Perse (futur Iran) en 1901 la concession exclusive du pétrole, sur la majeure partie du territoire, à l’exception des régions proches de la frontière russe (en 1907 les Russes et les Anglais signeront un accord départageant les zones d’influence de leurs empires respectifs en Perse et en Afghanistan). Sept ans plus tard naît l’Anglo-Persian Oil Company (qui deviendra en 1935 l’Anglo- Iranian Oil Company, puis en 1954 la British Petroleum) qui va rapidement intéresser les autorités britanniques.
En effet, c’est à la veille de la Première Guerre mondiale que, pour la première fois, le pétrole devient un produit stratégique. Dès 1906, la concession pétrolière de William K. dArcy en Perse est placée sous la protection de soldats britanniques, car on envisage déjà de remplacer le charbon par le mazout comme carburant des navires de guerre britanniques (ce qui sera fait peu avant la guerre) et on craint l’influence allemande en Turquie. Berlin a en effet lancé l’idée d’une nouvelle route ferroviaire au Moyen-Orient, le Bagdad-Bahn (le « chemin de fer de Bagdad »), via Istanbul, qui concurrencerait la route des Indes contrôlée par les Britanniques et permettrait aux Allemands de s’assurer l’accès au pétrole de Mésopotamie puisque, selon cet accord, les Allemands pourraient exploiter les ressources souterraines sur vingt kilomètres de part et d’autre de la voie ferrée.
Prenant la parole devant le Parlement britannique le 17 juillet 1913, Winston Churchill, alors Premier lord de l’Amirauté, déclare : « Nous allons devenir les propriétaires [de
I’Anglo-lranian Oil Company], ou tour au moins avoir le contrôle à la source d’au moins une certaine proportion de brut dont nous avons besoin. »3
Quelques mois plus tard, le gouvernement britannique achète 51 % des actions de la compagnie. Les Britanniques ont également assuré l’exploitation de gisements dans la péninsule arabique en signant en 1892 un traité de protectorat avec le cheikh de Bahreïn et avec celui du Koweït en 1899.
Dans un contexte de rivalité – non seulement avec les Allemands mais aussi avec les Américains qui s’intéressaient eux aussi aux gisements présents dans l’empire otto-man-, les Britanniques parviennent à passer un accord avec le gouvernement des jeunes Turcs, des officiers nationalistes qui prennent le pouvoir à Istanbul, en 1908. Un accord est passé entre eux, permettant de créer la Turkish Petroleum Company (à laquelle participent la Banque impériale ottomane, l’Anglo-Persian Company, la Royal Dutch-Shell et la Deutsche Bank) en janvier 1911, grâce à l’intervention d’un homme d’af¬faires ottoman d’origine arménienne, Calouste Sarkis Gulbenkian, hostile aux Américains. Cet accord s’avère une excellente affaire pour les Britanniques, puisque ces derniers ont réussi à obtenir des Allemands qu’ils concèdent une partie de leurs avoirs dans la banque impériale ottomane à l’Anglo-Persian Company.
Au départ, le pétrole concerne surtout la forte demande de combustible pour lampes, tandis que le charbon demeure le principal combustible industriel. Puis, peu à peu, le moteur à explosion se répand, créant une nouvelle demande pour le carburant pétrolier. Mais c’est la Première Guerre mondiale qui va provoquer l’envol de la production de pétrole, puisqu’on passe de 40 millions de tonnes produites en 1910 à 110 millions de tonnes en 1921, soit une augmentation de 130 %. Le pétrole est en effet devenu un carburant essentiel non seulement pour les navires, mais aussi pour les nouveaux types d’armement tels que les chars, les avions, ainsi que pour la logistique comme les camions ou pour le transport de troupes comme les taxis de la Marne, utilisés par le général français Gallieni en septembre 1914 pour permettre à deux régiments (soit 4 000 soldats) de rejoindre le front à bord d’un millier de taxis parisiens. Le contrôle des installations pétrolières est donc devenu indispensable aux grandes puissances de l’époque, d’autant plus que l’industrie pétrolière connaît un tournant majeur avec l’essor de l’automobile.
Le rôle de l’automobile
En particulier, l’importance croissante du transport automobile va assurer la prépondérance au pétrole. C’est l’Américain Henry Ford, inventeur de la Ford T en 1907 qui lance l’essor de l’automo- oile puisqu’il vise une consommation de masse. Très rapidement, sa production s’envole grâce à l’utilisation de machines-outils, et surtout à la mise en place du travail à la chaîne, nventé par Charles Taylor. La standardisation des produits permet d’abaisser les coûts, tandis que l’augmentation des salaires élève le pouvoir d’achat des consommateurs. La production et la consommation augmentent donc considérablement, surtout aux Etats-Unis : la population américaine, qui croît de 65 % entre 1900 et 1929, offre un arché intérieur bien supérieur à celui des Européens, qui tentent de s’inspirer du-odèle américain. Ainsi, en France, le constructeur Louis Renault, qui est allé aux Etats- Jnis suivre un stage dans les usines Ford, lance à son tour une production massive -automobiles.
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