Poisson-roseau
La première description d’un polyptère, le bichir, est due à Geoffroy Saint-Hilaire, qui en recueillit un dans le Nil lors de la campagne d’Égypte de Bonaparte. On connaît maintenant une dizaine d’espèces dont la répartition s’étend du Sénégal au Nil en passant par la Gambie, la Volta, le Niger, le Congo et de grands lacs comme le lac Tanganyika ou le lac Rodolphe. La majorité des espèces ne dépasse pas 50 centimètres, mais celle du lac Tanganyika, qui a trouvé dans cette vaste étendue d’eau des ressources alimentaires abondantes, peut atteindre près de 1 mètre. Le poisson-roseau, long d’une trentaine de centimètres, vit dans la bande côtière qui sépare les deltas du Niger et du Congo.
La découverte récente en Bolivie de polyptères fossiles du début de l’ère tertiaire montre que leur répartition était à cette époque beaucoup plus vaste.
Vessie gazeuse ou poumons?
A l’inverse des poissons pulmonés (dipneustes), les polyptères et le poisson- roseau ne peuvent pas vivre hors de l’eau ; ils se trouvent rarement dans des zones régulièrement asséchées, mais quand leurs branchies ne trouvent plus assez d’oxygène dissous dans les marais et les zones vaseuses qu’ils recherchent, ils aspirent l’air en nature par un spiracle; ils utilisent alors leurs deux poumons (le droit, le plus long, atteint l’anus vers l’arrière, le gauche l’estomac seulement) qui fusionnent avant de s’ouvrir dans le pharynx postérieur par une glotte typique ; leur irrigation, qui rappelle celle des vertébrés terrestres, en fait de véritables poumons, à cela près que leurs parois ne sont pas alvéolisées mais parcourues de plis longitudinaux. Quelques ichtyologistes répugnent encore à attribuer à ces organes une nature véritablement pulmonaire et préfèrent y voir une vessie natatoire aberrante. Polyptères et poisson-roseau nagent par ondulations latérales à la façon des anguilles, les nageoires ne jouant qu’un rôle secondaire de stabilisateurs. Ils se nourrissent de petits invertébrés et de poissons.
Lorsque survient la saison humide et que rivières et marais sont en crue, les polyptères gagnent les zones inondées riches en végétation et s’accouplent. On reconnaît les mâles à leur nageoire anale plus puissante, mais on ne sait pas si elle intervient dans la fécondation. Les œufs, petits et fortement adhésifs, sont abandonnés au milieu de la végétation et donnent rapidement naissance à des larves dotées de quatre paires de branchies externes et d’un organe de fixation, ressemblant ainsi aux têtards d’amphi- biens ; ces organes disparaissent au bout de quelques semaines.