La neurocrâne et le splanchnocrâne : La croissance
Il ne paraît pas inutile, à propos du cerveau de l’embryon, du nouveau- né, de l’enfant et de l’adolescent, de parler des variations de la croissance des deux étages de la tête de l’Homme et des Mammifères : le neurocrâne qui contient le cerveau, et le splanchnocrâne où se trouve le système aéro¬digestif supérieur.
LA CROISSANCE
Le neurocrâne
Entre les os fragiles de la calotte crânienne d’un fœtus sont de vastes espaces membraneux appelés fontanelles. Au niveau de la base, plus rigide en raison de son origine cartilagineuse, existent aussi des espaces suturaux fontanellaires.
Chez le nouveau-né, certains os commencent à s’engréner et même à se souder. Les fontanelles astériques, ptériques, lambdatiques disparaissent dans l’ordre durant les six premiers mois ; la bregmatique durant la troisième année.
Chez l’adolescent, les sutures sagittale, coronale et lambdoïde, qui persistent sont lâches.
L’accroissement du crâne est lié à celui de l’encéphale. Il est par conséquent surtout marqué durant les deux premières années. Le volume cérébral et la capacité du crâne doublent de 0 à 6 mois et triplent en 2 ans.
Toutes les mesures s’accordent pour démontrer l’importance du développement du neurocrâne pendant les deux premières années et surtout la première. Son développement se poursuit jusqu’à 20 ans ; il devient cependant plus lent à partir de 13 ans. La croissance du crâne ne progresse donc pas régulièrement comme celle du corps.La précocité du développement du crâne cérébral par rapport au crâne facial est évidente : A la naissance, la face est le 1 /8e du crâne, à 2 ans l/6e, à 5 ans 1/4, à 10 ans 1/3, à 20 ans 1/2. La hauteur du neurocrâne est chez le nouveau-né 64 % de ce qu’elle sera chez l’adulte, tandis que celle de la face est de 33 %.
La base du crâne, de par sa situation intermédiaire, est très en retard sur la calotte et liée au tardif développement de la face. Chez le nouveau-né, la calotte surplombe la base qui en vue endocrânienne paraît relativement étriquée.
La fermeture des sutures ou synostoses serait plus précoce chez les Singes anthropoïdes que chez les Hommes. Elles se feraient d’avant en arrière chez le premier, et d’arrière en avant chez les Hommes : ainsi les lobes frontaux, siège des plus nobles facultés, auraient pour se développer plus de temps et plus d’espace.
D’après certains auteurs, des variations existeraient chez les Hommes et les sutures seraient plus tardives chez les intellectuels. Ribbe citait l’exemple du crâne de Descartes, mort à 54 ans, et dont aucune suture n’était encore fermée.
En réalité, pour émettre des conclusions valables, il faut disposer d’un matériel suffisant. La seule série importante est celle de Todd et Lyon. D’après eux, c’est de 22 à 26 ans que débute normalement la synostose ; de 28 à 30 ans, elle est plus active et, de 35 à 50 ans, elle est complète. Elle n’envahit pas simultanément les sutures mais l’une, puis l’autre, et l’ordre serait sagittal, coronal et lambdoïde. Les mêmes auteurs ne constatent pas de variation raciale, ni de différence sexuelle.
Les synostoses prématurées provoquent des déformations crâniennes. Chez le fœtus, elles sont exceptionnelles. Chez l’enfant, dans la première année, elles constituent la crâniosténose avec des déformations variables suivant que telle ou telle suture se soude la première ; la souffrance du cerveau ou des nerfs optiques nécessite parfois des opérations.
Le splanchnocrâne
La face croît plus en hauteur (trois fois) qu’en largeur (deux fois). Dans son ensemble, elle apparaît chez le nouveau-né comme aplatie de haut en bas, comme écrasée par le neurocrâne. De profil elle est presque droite (orthognathe), alors qu’elle sera, surtout dans sa partie inférieure, projetée en avant (prognathe).
Les changements les plus importants de la face avant 15 ans résultent :
- du développement de la fonction respiratoire = agrandissement en hauteur et en largeur des cavités nasales ;
- du développement des organes oculaires = agrandissement des cavités orbitaires ;
- du développement de la fonction masticatrice. Cet appareil est pour le splanchnocrâne ce que le cerveau est pour le neurocrâne. L’allongement des arcades alvéolaires, l’éruption des dents lactéales et persis¬tantes, l’agrandissement de la voûte palatine, le développement des muscles masticateurs et de leur support osseux, l’extension des fosses temporales. Les dents conditionnent la morphologie des mâchoires : les dents édifient la face.
Le développement du splanchnocrâne se poursuit tard jusqu’à 22 ans dit-on.
Les synostoses crânio-faciales. Le sphénoïde et l’ethmoïde se soudent précocément, puis viennent la synostose naso-maxillaire et la maxillo-malaire ; cette dernière commence d’abord du côté orbitaire pour s’achever du côté genien après cinquante ans. La soudure internasale
serait plus précoce chez les anthropoïdes que chez l’Homme. La synostose prématurée du splanchnocrâne est plus rare que celle du neurocrâne.