L'évolution de l'esprit
L’esprit humaine
Darwin a écrit : « L’Homme est l’être unique auquel on puisse avec exactitude reconnaître la faculté morale. Et cela constitue la plus grande distinction que l’on puisse faire entre les animaux et l’Homme ». La morale est-elle le propre de l’Homme ? Les primatologues ont observé que les grands Singes font preuve d’une attention accrue envers les plus faibles ; les chimpanzés sont sensibles à la douleur d’autrui. La méchanceté n’est pas le leg de notre passé animal et la bonté n’est pas une caractéristique exclusivement humaine.
L’évolution vers le meilleur repose-t-elle sur des transformations physiques : volume accru du cerveau, perfectionnement de certaines structures cérébrales, ou sur la croissance de l’esprit, de l’intelligence, de la conscience ?
Entre l’Homo erectus et le Neandertalien, les modifications morphologiques étaient importantes, les variations comportementales minimes. De l’Homme de Neandertal à l’Homo sapiens, les modifications morphologiques sont moindres, les variations comportementales importantes.
Dans la progression de l’hominisation, nous n’observons pas, tout au moins dans les 100 000 dernières années, de modifications morphologiques. De l’Homme du Ve siècle à l’Homme actuel, elles sont nulles, mais le pouvoir d’action sur le milieu est sans commune mesure. Les progrès de la civilisation, le perfectionnement de nos protections ont supprimé l’action des facteurs qui peuvent être à l’origine de modifications physiques. Les transformations évolutives s’appellent désormais inventions, techniques biologiques, physiques, électroniques, moléculaires plutôt que mutations ?
La gestation de l’intelligence a demandé des millions d’années. Le premier Mammifère est apparu il y a cent trente millions d’années ; le premier Primate il y a quelques dizaines de millions d’années ; les premiers Homi- nidés il y a huit à dix millions d’années ; le premier Homo sapiens il y a environ trois cent mille ans ; son cerveau s’est peu modifié depuis. La progression de l’intelligence au cours des temps historiques a été technique et
spéculative ; elle s’est réalisée plus dans le domaine culturel que dans le structurel. On a pu parler d’une évolution vers I Homo spiritualis.
Avant l’Homme, les transformations phylogénétiques étaient le résultat de mutations triées par la sélection naturelle. Sur lui elle ne joue qu’un rôle secondaire. L’évolution biologique a multiplié les diversités. L’évolution socio-culturelle, commencée il y a 6 à 5 000 ans, les atténue au contraire et parfois même les fait disparaître ; les habitudes, les mœurs, les conceptions, les manières de vivre, de s’habiller, s’uniformisent. L’évolution culturelle ne suit pas les règles darwiniennes. Il n’y a pas inscription et transmission des caractères acquis psychiques et physique par les gènes. La trans¬mission est faite par la parole, les écrits, les objets. « Nous sommes des nains juchés sur les épaules de géants »… déclara au XIIe siècle Bertrand de Chartres (un vitrail de la Cathédrale de Chartres le représente).
Toute acquisition culturelle est aussitôt enregistrée ; ce qui la rend accessible dans le monde entier. L’étape planétaire qui s’ébauche suppose un peuplement très dense avec circulation facile des idées, des découvertes, des matériaux et des Hommes. Sous nos yeux, l’embryon de l’humanité future prend forme. Ses organes naissent, grandissent, se raccordent. Le système nerveux est constitué par un réseau de communications, télégraphe, radio, télévision, internet ; l’appareil circulatoire est représenté par les voies ferrées, maritimes, aériennes ; les cerveaux sont les universités, les institutions de recherche ; les organes de réserves sont les magasins, les silos, les entrepôts, etc. L’ordinateur représente une sorte de surhomme nietzschéen, mais l’automatisation doit être le serviteur de l’Homme et non son Maître. Cet embryon géant, ce fœtus, véritable métamorphose humaine, ne cesse de croître. Il peut aussi aboutir à une faillite ; la puissance atomique est placée entre les mains de quelques hommes, les risques de destruction sont plus grands que jamais. L’humanité peut par contre s’épanouir à un niveau supérieur portant à tous prospérité, abondance bonheur ?
Le génie génétique a-t-il rendu l’Homme maître de sa mutation ? De même que l’énergie thermo-nucléaire dont il se sert est devenue explosive, il semble de plus en plus capable de participer à son évolution. La pratique de la transgénèse sur les végétaux et les animaux et le clonage pratiqué chez certains Mammifères permet d’envisager la création possible de nouvelles espèces végétales – ce qui est fait – mais aussi de nouvelles espèces animales et humaines. L’homme sera-t-il un jour capable d’atteindre sa cérébralité ?
L’évolution socio-culturelle va-t-elle vers le meilleur ? plus de moralité, plus de générosité ? Les événements historiques, la réalité quotidienne font ressentir la force des racines animales de l’Homme. La précaire pellicule de notre civilisation, des idéaux formulés par des hommes hors série : prophètes, saints, rêveurs, prêtres, philosophes, tombent trop souvent dans l’oubli et dans le pur formalisme…
A la fin du XVIIIe siècle, Condorcet (1743-1794) a exprimé sa croyance en une humanité progressant dans la connaissance, les sciences et dans l’usage de la raison ; il écrivait dans L’esquisse qui est l’aboutissement de toute son œuvre : « Si comme je le crois, le perfectionnement indéfini de notre espèce est une loi générale de la Nature, l’homme ne doit pas se regarder comme un être borné à une existence passagère et isolée ; il devient une partie du grand tout et le coopérateur d’un ouvrage éternel ».
J.E. Renan (1 823-1 892), dans L’avenir de la Science, ouvrage conçu à partir de 1 848 et publié en 1 890, exprime sa confiance dans le rôle de la science dans l’évolution de l’esprit humain : « Ce n’est pas une exagération de dire que la science renferme l’avenir de l’humanité, qu’elle seule peut lui dire le mot de sa destinée et la manière d’atteindre sa fin ».
Teilhard de Chardin (1 881-1 955) , conciliateur des exigences de la foi et de celles de la science, a exprimé des formules magnifiques : « L’homme n’est pas le sens de l’univers mais, ce qui bien plus beau, il est la flèche montante, la grande synthèse biologique ». « Tout ce qui monte converge ». Pour Teilhard, l’Evolution conduit sans cesse à plus de psychisme, à plus de conscience ; elle est engagée vers le « Point Oméga », vers une sorte de super-conscience.
Des scientifiques ont conclu dans le même sens : « Il est trop tôt, écrit Lecomte du Nouy (1 883-1 947) , pour demander à tous les hommes de penser l’universel, « de se considérer comme les éléments de l’humanité entière »… « L’homme sait qu’il est l’avant-coureur d’une race plus belle et plus parfaite qui sera pour une partie son œuvre. Il devrait être fier de la responsabilité qui lui est dévolue »… J. Herniaux croit à l’évolution de l’ensemble des Hommes vers une surhumanité : « Du stade de début, nous ne pouvons imaginer que confusément l’intensité et la qualité des formes psychiques et sociales qui en seront les éléments dont nous sommes la pré¬figuration ». J. Piveteau parle d’une seconde hominisation par apparition de qualités psychiques nouvelles… J. Ruffié conçoit des « paliers d’intégration » successifs de plus en plus complexes qu’il propose d’appeler
« mégagénèse ». Dans un nouveau palier, dont nous sommes incapables d’imaginer la nature et l’ampleur, l’Homme post-historique perdra ses derniers comportements animaux et n’aura plus que des comportements humanisés. La sagesse devrait l’emporter sur la folie, la raison sur la passion, l’altruisme sur l’égoïsme, la justice sur l’exploitation, la modestie sur l’orgueil… »
Toutes ces déclarations sont inspirées par l’espoir qu’après l’hominisation viendra l’humanisation.
Des constatations récentes amènent à admettre que l’intelligence générale augmente, tout au moins augmente l’habileté à répondre aux tests. Le nombre des candidats au baccalauréat ne cesse de croître de même que le nombre des bacheliers. Est-ce le résultat des progrès de l’instruction, de l’information ? Est-ce celui d’une meilleure hygiène, d’une alimentation équilibrée ? Est-ce accompagné par un accroissement, ou par un perfectionnement du cerveau ? Est-ce organique ou social ?
Certains futurologues entrevoient la symbiose entre l’Homme et l’ordinateur. Elle nous permettrait de communiquer avec tout le monde, de parcourir les routes de l’information, de scruter les banques de données de la planète. Ainsi serait constituée une sorte de cerveau planétaire.
L’homme a découvert qu’il n’est pas le centre de l’Univers, qu’il n’est qu’une branche de l’arbre de Vie ; il en reçoit une leçon d’humilité, mais il est conscient qu’avec lui s’est particulièrement développé l’organe générateur de la pensée. Il en est qui, comme Jacques Monod, voient là le résultat du hasard absurde ; d’autres comme Teilhard de Chardin y voient une finalité.
Croyants et athées sont d’accord pour admettre que l’Homme peut et doit participer à son devenir. Dans l’Ancien Testament, il est écrit qu’il est « une promesse ». En dehors de toute transcendance, l’évidence est qu’il s’est progressivement dégagé de l’animalité. Il est le marbre et le sculpteur : à partir de la matière première humaine, il doit sculpter l’Homme futur. Il ne vit pas seulement dans le présent ; il laisse un sillon derrière lui et le trace par avance dans le futur. Il est responsable de dénouements qui jusque-là n’appartenaient qu’à la nature. Au-dessus du sensible et de l’intelligible, au-dessus du progrès mental, est le progrès moral. Il arrive malheureusement souvent qu’il ne se fasse pas à la même vitesse. Les découvertes, les inventions et leurs applications parfois dangereuses progressent très
vite ; le sens moral est pris de vitesse… La sagesse doit accompagner le savoir.
Notre esprit a du mal à appréhender l’infini et l’éternité. Dans la plupart des domaines, notre réflexion est dominée par la relativité de notre existence dans l’espace et dans le temps.
La durée de nos vies, celle de l’Humanité, celle du temps qui nous sépare des Simiens sont mille fois inférieure à celle présumée du monde solaire et des milliards de fois à celle de l’Univers.
D’autres arbres de vie se sont peut-être développés en d’autres points de l’immense et si divers Cosmos ?
Que deviendra notre cerveau dans les millions, les milliards d’années futures ? Sommes-nous une étape ou une fin ?
Vidéo: L’évolution de l’esprit
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