Espaces sociaux dans les sociétés animales : Les oiseaux
La notion de territoire a d’abord été découverte chez les oiseaux : les territoires de reproduction des oiseaux chanteurs en fournissent exemple le plus marquant. Mais il existe plusieurs catégories de territoires et, dans chaque cas, cette zone a pour l’oiseau une valeur pratique précise.
De nombreuses espèces, tels les rougegorges (Erithacus rubeculd), les bruants (genre Emberiza), les troglodytes (Trogbdytes trogbdytes) ou les pies-grièches (genre Lanius), entretiennent des territoires d’habitation et d’alimentation dont la taille peut parfois atteindre un hectare et plus. D’autres, comme les étourneaux (Stumus vulgaris) ou les piverts (Fiais viridis), limitent leur territoire aux environs immédiats de leur nid: arbre ou simple buisson. Ils ne l’utilisent que pour dormir.
Une valeur pratique précise:
L’alimentation:
Il peut aussi ne jouer qu’un rôle alimentaire, surtout durant la mauvaise saison : les oiseaux ne le fréquentent alors que pour se nourrir, allant dormir ailleurs. C’est le cas pour la grive draine (Turdus viscivorus), le merle migrateur, le serin et la fauvette à tête noire.
La reproduction:
La plupart du temps, les territoires des oiseaux sont cependant étroitement liés à la reproduction et, ici encore, leur étendue varie beaucoup.
Le choix et l’établissement d’un territoire constituent généralement le premier stade de la reproduction. Par l’isolement des congénères que le territoire autorise, garantissant ainsi la tranquillité nécessaire aux ébats amoureux, à la construction du nid. à la copulation, puis aux soins à donner aux petits, il serait favorable à l’espèce (F. Howard, 1948). Le mot de l’ornithologue E.A. Armstrong (La vie amoureuse des Oiseaux, Albin Michel. 1952) est, à cet égard, significatif:
« Etre scandalisé par les actes sexuels des autres est un sentiment naturel qu’on observe fréquemment dans le monde animal.»
Les diverses activités de la reproduction semblent, en tout cas, stimulées par la présence du partenaire sur le territoire, généralement choisi par le mâle qui essaie d’y attirer une femelle.
La défense du territoire:
Quand le territoire est bien délimité et installé, l’oiseau mâle, plus attaché à cette zone que la femelle, en connaît les frontières avec précision et le défend de toute son ardeur contre les autres mâles de son espèce. Pour ce faire, il use de moyens très variés : attitudes intimidantes ou menaçantes, coups de becs ou même, au besoin, véritables combats.
Les cris et chants:
Cris et chants jouent ici un rôle essentiel. Chez le rougegorge, par exemple, le chant constitue avant tout un avertissement. S’il entend un congénère chanter, l’oiseau sait qu’il a outrepassé les limites et qu’il doit quitter très vite la zone défendue sous peine de sérieuses représailles. Quant au propriétaire du territoire, le chant de l’intrus le pousse à tenter frénétiquement de le répérer – aux plumes rouges de sa poitrine – pour l’attaquer s’il s’obstine à rester à l’intérieur des frontières défendues. N. Tinbergen écrit («The Functions of Territory» in Bird Study 5, 1957) sur le ton de la plaisanterie anthropomorphique :
« Il est étonnant de constater les réactions intenses des autres oiseaux en présence de chanteurs dissimulés à leur vue. Ceux qui franchissent les limites sont les personnifications de la mauvaise conscience ; les possesseurs de territoire expriment une légitime indignation.»
En fait, les véritables combats sont très rares, même si le propriétaire marque ses terres de signaux avertissant sans équivoque qu’il est prêt à les défendre avec âpreté.
Les autres manifestations:
Tout le comportement territorial des oiseaux, dont leur agressivité potentielle ou manifestée, est très largement conditionné par l’hormone mâle. Mais d’autres facteurs, émotionnels en particulier, inter viennent : ainsi, le mâle se défend mieux lorsqu’il se trouve sur soi territoire qu’en n’importe quel autre lieu. Généralement, il s’y montre dominant et invincible. Des mésanges à tête noire (Paru, atricapillus) transportées sur un territoire étranger y occupent dan: la hiérarchie sociale des positions inférieures à leurs anciennes places N. Tinbergen (1957) a également noté que le bruant des neige: (Plectrophenax nivalis) défend son territoire avec plus d’opiniâtreté lorsque la femelle s’y trouve.
À noter aussi que chez le tyran royal (Tyrannus tyrannus), le comportement territorial disparaît dès la tombée du jour.
Ajoutons que chaque espèce possède des moyens particuliers de défense du territoire : chants, attitudes, postures, éventuels coups de bec.
Territoire et socialité chez différentes espèces:
Le territoire marquerait-il un caractère d’insociabilité?
On peut si poser la question si l’on considère que durant la phase de repos sexuel l’oiseau fait montre d’une attitude calme et sociale dans sa vie de groupe, alors qu’au moment de la phase territoriale, tandis qu’il tente de conquérir un partenaire sexuel, il manifeste une agressivité grandissante. Le territoire serait donc lié à la phase de vie solitaire.
En fait, les phénomènes sont beaucoup plus nuancés et la défense d’un territoire n’entraîne pas nécessairement la disparition de tous groupe social. Il est vrai, néanmoins, que la plupart des espèce d’oiseaux vivent en bandes en dehors de la saison de reproduction et que la dissociation des groupes débute en même temps que 1 comportement territorial.
Les jaseurs:
Les jaseurs (Bombycilla) se réunissent en grandes bandes pendant l’hiver et les couples s’isolent au moment de la reproduction tout en reconstituant des bandes pour se nourrir ensemble dans les environs. Les jeunes, quelques jours à peine après leur sortie du nid, s réunissent aussi pour former une bande.
Les tisserins:
D’autres oiseaux, tels les «travailleurs à bec rouge» (Quelea quelea) tisserins les plus communs d’Afrique, se reproduisent tout en se main tenant en colonies très denses: seule l’entrée du nid est défendu contre l’intrusion des congénères. Dans ces colonies, les individu construisent des nids séparés, seule propriété véritablement exclusive du couple, les nids de la colonie étant plus ou moins confinés au même endroit. Ce phénomène est également visible chez les oiseaux de mer qui occupent une petite île ou une falaise rocheuse, lieu privilégié d leur nidification annuelle. Chez quelques espèces, curieusement, deux ou plusieurs femelles déposent leurs œufs dans le même nid et assurent ensemble la couvaison et la charge des poussins.
Les crotophages:
Dans la famille des crotophages (qui compte plusieurs espèces de coucous), le territoire, utilisé à la fois pour la nourriture, la nidification et le perchage, appartient à l’ensemble du groupe qui le défend collectivement. Une espèce de cette famille, le coucou guira, coucou bâtisseur de nid, à la différence du coucou commun (Cuculus canorus), vit seul et n’a de lien avec ses congénères qu’au niveau du couple. Ces oiseaux ne défendent pratiquement pas leur nid : on pense qu’il s’agit là, probablement, d’un prélude à la nidification commune observée chez les autres espèces de cette famille. Dans la même famille, une autre espèce (l’ani à bec cannelé, Zrotophaga sulcirostris) manifeste peu de liens de couple mais pratique la polygamie, les femelles ne défendant pas le territoire de leur nid.
Les canards:
Chez les canards, on observe souvent, par exemple au bord des lacs ce nos parcs, des vols dits « à trois oiseaux », véritables poursuites ariennes qui sont des vols d’expulsion, conséquence du comportement territorial. Ce comportement se produit lorsqu’un mâle déjà accouplé s’est envolé de son lieu de repos favori dans son domaine vital et qu’il poursuit un autre couple sorti de son propre espace aérien (situé au-dessus du nid). La poursuite est d’ailleurs dirigée surtout contre la femelle du couple usurpateur le poursuivant la harcèle jusqu’à ce qu’elle change de direction, tandis que le mâle du couple pourchassé se contente de suivre sans faire grand effort pour assister sa femelle ] La poursuite cesse lorsque le couple il pu être repoussé à quelques centaines de mètres.
Cette poursuite de défense est aussi vigoureuse sur terre que sur eau. Un canard mallard (Anas Platyrhynchos) ou canard colvert Anas platyrhynchos), par exemple, bien installé sur son territoire qui voit s’y poser un couple d’intrus se précipite vers eux dans ne posture caractéristique : attitude de menace, tête baissée et tendue vers l’avant, puis poursuite sur l’eau ou sur terre qui peut dégénérer en combat entre les deux mâles.
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bien