Les équidés , ou l'histoire d'un mythe : Les lignées évolutives mythe ou réalité ?
Les lignées évolutives sont décrites uniquement quand elles ont échoué. Tous les cas jusqu’alors bien documentés ressemblent à la lignée du cheval. Chez les groupes encore très bien représentés à l’heure actuelle, il est absolument impossible de définir une quelconque direction de l’évolution. Il n’est qu’à considérer le groupe des Artiodactyles, les ongulés à nombre pair de doigts, pour s’en persuader. Chez ce groupe en effet, la situation ressemble sans doute à ce qu’elle était pour les Équidés à la fin du Miocène. On y trouve des formes de tailles très variables, depuis les petits Dik-Dik jusqu’aux imposants Buffles, pour ne considérer que la seule famille des Bovidés.
Chez les Équidés, ce que l’on observe à l’heure actuelle c’est donc l’échec évolutif et l’extinction d’un groupe. Les figures utilisées pour illustrer l’évolution du groupe représentent la plupart du temps les époques du Cénozoïque sans respecter une échelle linéaire, c’est-à-dire proportionnelle à leur durée . C’est caricatural pour le Pliocène et cela exagère l’importance du rameau survivant, dont l’un des représentant est « la plus noble conquête de l’homme ». Ceci n’est peut être pas étranger à tout cela. Si on représente ce dernier rameau en respectant une échelle de temps linéaire pour toutes les époques du Tertiaire et du Quaternaire l’effet de lignée s’estompe. Si on représente l’évolution du groupe avec les figurés généralement utilisés, c’est-à-dire en négligeant l’aspect géographique et en représentant chaque genre par un trait unique, comme cela a été fait pour les Ammonites par exemple , alors on observe quelque chose qui semble fréquent dans l’évolution, une succes¬sion de phases de radiation et d’extinction , un mince filet ayant «miraculeusement » échappé à la dernière et parvenu jusqu’à nos jours. La représentation prend ici une importance singulière. Les tendances évolutives proviennent en partie de la présentation incomplète des pièces du puzzle et du choix de l’échelle de temps dans la représentation.
L’histoire de la famille semble marquée par des phénomènes de spéciation explosive, ou radiation, faisant apparaître brusquement de nombreuses espèces. C’est ce qui s’est produit au cours du Miocène et le nombre d’espèce est ensuite resté relativement stable (Mac Fadden & Hulbert 1988). Les modèles de ces auteurs nous présentent une courbe de croissance logistique, sigmoïde, du nombre d’espèces tendant vers une saturation , sans doute après l’occupation de toutes les niches écologiques disponibles . La stabilité se maintient jusqu’à la limite Miocène-Pliocène où on observe une phase d’extinction quasi générale, à l’exception d’un rameau à l’origine du genre Equus. Des travaux récents (Cerling et al. 1997) montrent que cet événement est peut-être de nature écologique. En analysant la composition en différents isotopes du carbone (S13C) de l’émail des dents de différents Mammifères, actuels et fossiles, et en comparant les résultats avec la composition des végétaux, les auteurs ont mis en évidence un important changement de la nature de la végétation il y a 6 à 8 millions d’années. D’un monde de plantes herbacées à métabolisme C3 on est alors passé à un monde à plantes herbacées du type C4-C3 suite à une diminution du taux de CO2 atmosphérique. La coïncidence entre ces deux événements, changement écologique et extinction, apporte largement autant d’arguments que l’existence d’une loi interne d’évolution du groupe. Surtout si l’on considère que les plantes en C4 accumulent souvent de la silice dans leurs tissus, ce qui favorise très certainement les individus dont les dents sont les plus résistantes où qui compensent rapidement leur usure.