Les localisations cérébrales de l'antiquité à l'imagerie moderne : Le XVIe siècle
Le XVIe siècle apporta un changement radical dans les connaissances médicales et dans la façon de les acquérir. Il se caractérisa par un un esprit critique dans l’acceptation des faits et l’ensemble des réalisations en anatomie. La Renaissance constitue une vraie mutation. Autre caractéristique : le contact direct avec la nature, qu’il s’agisse de l’artiste ou de l’anatomiste parfois confondus dans la même personne comme chez Léonard de Vinci (1452-151 9), parfois par une association comme dans le cas de Vésale (1514-1564) et de Calcar, ou dans celui de Colombo, qui a découvert la petite circulation, et de Véronèse. Léonard de Vinci représente pour la première fois des aspects inédits du cerveau humain : vues supérieure, sagittale, de la base, du cervelet et des lobes olfactifs. Les ventricules cérébraux dont il montre la configuration exacte sont reproduits grâce à sa technique d’injection de cire chaude qui, une fois solidifiée, rend leur moulage. Il rompit avec la conception ventriculaire et logea l’âme, comme d’ailleurs le point d’arrivée des impressions reçues par les sens, dans la base du cerveau. Les travaux scientifiques de Léonard de Vinci n’ont exercé aucune influence sur les savants des siècles suivants, ils sont restés méconnus pour être redécouverts au XIXe siècle. L’impulsion naturaliste, l’observation précise, alliées à l’iconographie introduites par l’esprit de la Renaissance, firent leur chemin. On les retrouve chez Barengario de Carpi (1460-1530) qui publia la première anatomie illustrée et qui, du point de vue des localisations cérébrales, introduisit la nouveauté de la localisation de la mémoire dans les ventricules antérieurs et non pas seulement dans les postérieurs comme le voulait la tradition. De même, il nia l’existence chez l’Homme du rete mirabilis, riche réseau vasculaire situé à la base du cerveau chez certains animaux dont Hérophile et Galien avaient doté l’Homme et qui servait d’après eux de lieu de distillation du sang dont résultaient les esprits animaux. Vésale a été aussi celui dont l’attitude concernant les localisations cérébrales a été la plus scientifique. Ses dissections du cerveau surpassent celles de ses prédécesseurs. Des expériences sur le fonctionnement des nerfs sont décisives. Il refusa d’accepter la conception de la localisation des fonctions dans les ventricules cérébraux par réaction contre les scholas- tiques et les théologiens. Dans le dernier chapitre de son ouvrage Dehumani corporis fabrica (1543) consacré aux vivisections, son rejet de la doctrine des localisations cérébrales s’accompagne de la recommandation d’étudier la sensibilité et la motilité chez les blessés du crâne, témoignage de son bon sens clinique.