Les marchés dérivés énergétiques
Depuis quelques années, les transactions sur les marchés dérivés énergétiques ont progressé à un rythme spectaculaire. Il en est de même pour leurs prix. De telles augmentations suscitent naturellement des questions. Faut-il s’inquiéter d’un développement aussi soutenu ? Est-ce allé trop loin ? Que penser de la possibilité qu’offrent ces marchés de jouer d’un puissant effet de levier ? Sont-ils véritablement opaques et il liquides ? Répondent-ils à un réel besoin ? Faut-il limiter les interventions des spéculateurs sur ces marchés, de peur que leurs interventions ne génèrent de la volatilité en excès, susceptible de déstabiliser les marchés physiques ? Ce chapitre vise à répondre à ces questions ou, tout au moins, à apporter une part de réponse, à chaque fois que cela sera possible. Il est centré sur les marchés dérivés et, plus spécifiquement, sur les marchés dérivés énergétiques 1.
Panorama des marchés dérivés énergétiques
Dans ce paragraphe, nous commençons par présenter un historique des marchés dérivés énergétiques. Nous commentons ensuite les récentes évolutions observées sur ces marchés. Enfin, nous les comparons aux marchés dérivés ayant pour sous-jacent des actifs financiers traditionnels.
L’émergence des marchés dérivés énergétiques
L’histoire des marchés dérivés énergétiques est semblable à celle qu’ont connue la plupart des autres instruments dérivés 2. Quel que
soit l’actif sous-jacent concerné, la même loi prévaut : les marchés dérivés sont toujours créés en réponse à une volatilité de l’actif physique sous-jacent, que ce soit au moment où cette volatilité se manifeste pour la première fois, ou lorsqu’elle commence à être perçue comme une source de difficulté pour les opérateurs.
Le premier instrument dérivé énergétique fut lancé en 1978, sur un produit pétrolier : le fioul domestique. Cette création ne fut pas le fruit du hasard. D’une part, la fin des années soixante-dix marquait la fm de la stabilité des prix du pétrole. D’autre part, contrairement à ce que l’on aurait pu craindre pour le pétrole brut, aucune menace d’action oligopolistique ne pouvait planer sur un produit pétrolier. Au cours des dix années suivantes, la crainte de la volatilité conduisit à la création d’instruments dérivés sur tous les produits pétroliers importants, d’abord aux États-Unis, puis en Europe : le fioul 3 en 1978, le gasoil4 en 1981 et le pétrole brut5 en 1983. L’année 1983 constitue une importante étape puisque les deux contrats futures sur le pétrole brut introduits à cette date sont aujourd’hui les deux instruments dérivés énergétiques les plus activement négociés au monde. Enfin, suite à la déréglementation des marchés du gaz naturel et de l’électricité, des marchés dérivés ayant ces sous-jacents pour support ont été créés, respectivement en 1990 et en 1996. Le mouvement a, cette fois encore, été initié aux États-Unis pour s’étendre ensuite, quelques années plus tard, en Europe.
L’évolution récente des marchés dérivés énergétiques
Depuis quelques années, le taux de croissance des transactions enregistré sur les marchés dérivés énergétiques est spectaculaire 6. En 2009, sur les marchés organisés, elles ont par exemple progressé de 20 %. Tous sous-jacents confondus, c’est le deuxième taux de croissance enregistré au niveau mondial. Avec une augmentation de 64,8 %, ce sont les contrats sur devises qui se trouvent en première position.
Au sein des dérivés énergétiques, le pétrole brut occupe une place à part, sur les marchés organisés, en 2008 et en 2009. Les contrats futures négociés au Chicago Mercantile Ex change occupent la première place, avec 137,43 millions de contrats échangés en 2009. S:
l’on ajoute à ce chiffre les 46,39 millions négociés sur l’intercontinental Exchange (Ice Futures UK), le volume des transactions sur le pétrole atteint 183,82 millions de contrats ! Or, le volume d’un seul de ces contrats représente mille barils ! De plus, d’autres instruments dérivés énergétiques occupent les 8e, 10e et 13e places : les matières premières énergétiques sont donc très importantes.
Un autre aspect non négligeable des marchés dérivés énergétiques réside dans leur volatilité. les matières premières sont généralement plus volatiles que les actifs financiers traditionnels. En sein de celles-ci, c’est le gaz naturel qui enregistre les plus fortes fluctuations de prix.
Ces différentes caractéristiques, combinées à l’augmentation soutenue des prix des marchés physiques sous-jacents, expliquent pourquoi les marchés dérivés énergétiques ont été au centre de toutes Inattentions ces dernières années. Récemment, ces marchés ont attiré de nouveaux opérateurs, tels que les hedge funds ou les investisseurs institutionnels. Ce n’est pas une surprise : la plupart des marchés énergétiques ont désormais atteint un stade de maturité satisfaisant ; de plus, ils sont caractérisés par une grande liquidité, tout au moins pour ce qui est des contrats à court terme . Or, ce sont précisément les caractéristiques que les spéculateurs apprécient le plus. De nos jours, les gestionnaires de portefeuilles considèrent même ces marchés comme une classe d’actifs à part entière ce qui, comme nous le verrons ultérieurement, pourrai: être à l’origine de certaines difficultés.
Pour compléter ce panorama il est nécessaire de souligner que, au sein de l’ensemble des marchés dérivés, les matières premières occupent toujours une place modeste, que ce soit au niveau des marchés organisés ou à celui des marchés de gré à gré. les dérivés sur matières premières restent beaucoup moins importants que, par exemple, les dérivés suit aux d’intérêt. Et le fossé qui sépare ces différentes classes d’actifs est: à profond que les dérivés énergétiques ont très peu de chances de parvenir sur le devant de la scène dans les années qui viennent.
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