Musaraignes
Les musaraignes ressemblent à des souris au museau démesuré. Leur pelage velouté n’arbore guère de couleurs : on reste dans les bruns feuille morte et les gris souris. Courtes sur pattes, les musaraignes ont des oreilles arrondies, presque nues, et de longues vibrisses sur un museau si mobile qu’il forme presque une trompe. Les yeux sont petits mais fonctionnels. La trompe cache une gueule redoutablement armée, avec des incisives en forme de grandes pinces aptes à saisir les arthropodes et les vers, et des molaires hérissées de pointes.
Un phylum vigoureux
Insectivores au sens zoologique, les musaraignes sont très anciennes ; on les reconnaît déjà en tant que telles il y a 50 millions d’années, avec leurs dents si particulières. Eurasiatiques de toujours, elles ont envahi avec succès l’Afrique et l’Amérique. La spéciation est toujours vive chez ces tout petits mammifères : chaque glaciation balaie leurs espèces en Europe, puis en amène de nouvelles.
Les musaraignes ont conquis toutes les terres accessibles à pied à partir de l’Asie. Elles s’arrêtent dans le nord de l’Amérique du Sud, peut-être à cause d’une forte compétition écologique avec les marsupiaux locaux. Elles n’ont pas atteint l’Australasie ; ni, d’une façon générale, les îles – à l’exception des îles habitées par l’homme depuis longtemps, comme la Corse. La dynamique de leurs populations est très labile : leur démographie varie vite en fonction des bonnes et des mauvaises années, et des changements de milieu. Malgré leur grande adaptabilité, elles sont perpétuellement soumises à des cycles de pullulation et de disparition.
Boulimiques et solitaires
Jour et nuit, les musaraignes passent leur temps à fourrager sur et dans le sol à la recherche des petites proies dont elles font une consommation énorme : tout fait ventre, d’un infime acarien jusqu’à un mulot dix fois plus gros quelles. Repues, elles se reposent quelques heures tout au plus, avant de se remettre en chasse. Les musaraignes à dents rouges ont un métabolisme tellement élevé qu’elles meurent de faim au bout de quelques heures de jeûne ! Peu sociables, elles creusent des terriers ou utilisent ceux d’autres animaux ; territoriales et agressives, elles signifient aux intruses qu’elles sont chez elles au moyen de démonstrations maxillaires et sonores, qui suffisent à éloigner la visiteuse.
Le rut provoque le rapprochement des mâles et des femelles dont les territoires se chevauchent. Les mâles s’approchent avec circonspection des femelles, tant que celles-ci ne les invitent pas explicitement à l’accouplement. Les portées ne sont pas très nombreuses, mais il peut y en avoir plusieurs par an. La mère allaite quelques semaines. Lors des sorties de la portée, les petits s’accrochent à la queue leu leu derrière leur mère, en mordant la queue ou les lombes de l’individu précédent.