Milieux abyssaux
Les abysses constituent de vastes plaines à pente faible, où l’absence de lumière interdit la production primaire par photosynthèse – d’où le nom de système aphytal : sans végétaux. Elles sont situées entre l’étage bathval, peuplement des talus continentaux jusqu’a environ 700 mètres de profondeur, et les grandes fosses de l’étage hadal (au-delà de 7 000 à 8 000 m). Elles ne sont présentes que dans les océans vrais : au niveau des plaines abyssales, la croûte terrestre s amincit et ses couches profondes affleurent. Sur les chaînes de montagnes sous- marines (les dorsales) et les lignes de fosses qui les bordent se produisent des phénomènes d’accrétion et de glissement qui provoquent le phénomène de la dérive des continents.
Un désert de boue
La surface, ondulée, est parsemée de nodules polymétalliques. Des traces animales, d’origine inconnue, constituent le trait dominant du paysage. Les masses d’eau se forment l’hiver dans les zones superficielles arctiques et antarctiques. Leur forte densité les entraîne vers le fond, où elles se répandent sur les plaines abyssales jusque dans l’Atlantique Nord. Les mécanismes Vivants y sont extrêmement lents. La vie doit ; adapter au froid (quelques degrés au- dessous ou au-dessus de 0 °C), à la pression et à l’obscurité. La nourriture, qui y est rare, provient entièrement de la couche euphotique supérieure. Le flux des particules, quelquefois appelé neige planctonique, est constitué de pelotes fécales, de cadavres, de particules organiques et de boules de mucus.
L’exploration de la faune des plaines abyssales par prélèvement depuis la surface est hasardeuse : on obtient des résultats aussi médiocres que si l’on tentait de capturer des animaux terrestres à l’aide d’un filet traîné par un avion qui volerait au-dessus des nuages… Quant aux investigations en sous-marins ou à l’aide d’engins photographiques téléguidés, elles sont limitées par le champ d’observation, une zone de 10 kilomètres sur 5 mètres de large pour le submersible français Nautile, par exemple.
La faune des grands fonds
Certaines espèces se retrouvent dans l’ensemble des milieux abyssaux ; cependant, l’isolement géographique des bassins, la lenteur des circulations, ainsi que la faible compétition entre les espèces favorisent l’apparition de nombreuses formes et de comportements divers, adaptés à la faible quantité de nourriture et aux nécessités de la reproduction. On trouve peu d’individus au mètre carré, mais une grande quantité d’espèces de toutes tailles, miniatures ou géantes : les abysses abritent les plus grands représentants de certains groupes comme l’isopode Bathynomus et le crabe Geryon.
Les stratégies d’alimentation, toutes orientées vers l’exploitation du flux particulaire, sont également très diverses : on observe, dans les plaines abyssales, des crustacés et des poissons brouteurs de crottes et de détritus, des anémones de mer étalées et montées sur échasses qui attendent passivement leur nourriture, des requins qui dépècent les cadavres tombés de la surface, ou des mollusques mangeurs de bois coulés.