Le temps des cailloux : La datation radioactive
La datation radioactive
Quentin a dix ans. C’est facile de le savoir, il suffit de se rapporter à sa date d’anniversaire, que toute la famille connaît, lui y compris. Son chat a cinq ans. Il est tout aussi aisé de le dire car la personne qui l’a donné à Quentin avait pris soin de dater sa naissance. Il existe ainsi, pour les êtres vivants, des repères dans le temps qui permettent de le jalonner, de marquer un signal dans le défilement des années. Mais qu’en est-il si l’on remonte plus loin dans le temps ? Qu’est-ce qui permet de dire que l’espèce humaine est apparue il y a plus d’un million d’années, que les dinosaures vivaient il y a cent millions d’années, que la vie a surgi sur Terre il y a trois milliards six cent millions d’années ? Et qu’en est-il de la datation des objets inertes, comme les cailloux, la Terre, le Soleil, les galaxies, l’univers, enfin ? Il nous est apparu opportun, en conclusion de ce rapide tour d’horizon des rythmes du vivant, de comprendre comment on pouvait connaître le temps qui s’est écoulé depuis leur apparition, pour quelques êtres et objets intéressants, notamment ceux que nous avons évoqué dans ce livre.
Dans les années 1940, des chercheurs américains découvrent une remarquable horloge à remonter le temps, jusqu’à cinquante mille ans en arrière de nous : la décroissance radioactive d’une forme de carbone appelée « carbone 14 », rendue radioactive sous l’effet de particules venues de la haute atmosphère. La découverte vaudra au Pr Libby le prix Nobel de chimie. Elle permet de dater avec une banne précision les restes fossiles de substances minérales ou de celles qui, vivantes, ont absorbé au cours de leur existence du carbone, le carbone )4 formant 1 % du carbone normal. Au moment de la mort de ces êtres vivants, ils cessent d’absorber du carbone, l’horloge à remonter le temps se met alors en route, car la radioactivité du carbone décroît régulièrement avec le temps, comme sa concentration en carbone 14. Comme on connaît le temps que met le carbone à se désintégrer – il perd la moitié de sa radioactivité en six mille ans environ, puis une autre moitié six mille ans plus tard, et ainsi de suite, il est aisé de se servir de la mesure de la radioactivité résiduelle comme une machine à remonter le temps.
Des techniques récentes ont permis de recalibrer ces horloges radioactives, en comparant les données qu’elles fournissaient avec celles d’éléments bien datés, comme des momies égyptiennes, ce qui a accru la précision de ces datations. De nouvelles techniques permettent aussi de compter les atomes radioactifs, ce qui autorise d’analyser des échantillons très réduits, de l’ordre du C’est ainsi que l’on a pu prélever de microscopiques fragments des peintures de la grotte de Lascaux ou de la grotte Chauvet, et les dater : les superbes rhinocéros de la grotte Chauvet sont vieux de trente-six mille ans, les taureaux de Lascaux ont dix-sept mille ans.
On a appliqué la même méthode à l’étude de la décroissance de la radioactivité de bien d’autres corps, comme l’uranium et le thorium, qui permettent de remonter beaucoup plus loin dans le temps. L’uranium 235, celui de la bombe, perd la moitié de sa radioactivité en quatre milliards et demi d’années et finit par se transformer en plomb, au bout d’une vingtaine de milliards d’années. C’est donc une horloge qui permet de remonter très avant dans le passé. Celle basée sur la baisse de la radioactivité du rubidium, qui se transforme en strontium, donne des informations jusqu’à quarante-sept milliards d’années : on l’utilise pour dater les objets spatiaux, et notamment les météorites, ces cailloux venus du ciel qui tombent régulièrement sur la Terre. C’est ainsi que l’on peut estimer, à quelques millions d’années près, que la Terre s’est formée il y a environ quatre milliards six cents millions d’années.
Vidéo: Le temps des cailloux : La datation radioactive
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