La géopolitique des conflits d’intérêts
Le jeu des interdépendances et des transferts rend le monde économique global plus complexe. Nous revenons ainsi à l’approche dialectique expliquée dans le premier chapitre qui met l’accent sur un processus permanent d’opposition entre des intérêts conflictuels. Dans ce dernier chapitre, les nouveaux défis énergétiques tendent à exacerber le jeu des intérêts conflictuels, notamment entre un bien public particulier – le climat – et un ensemble de biens privés qui génèrent de façon continue de l’argent et de la richesse.
Le climat en tant que bien public
La communauté politique internationale reconnaît maintenant la réalité du changement climatique, et accepte l’idée qu’il faudrait agir. Ceci peut être illustré par l’évolution du G8 depuis le Sommet de 2005 à Gleneagles. La légitimité du G8 a été remise en question. Les huit pays dominants représentaient 65 % du PIB mondial mais seulement 15 % de la population mondiale. Ils ont été les acteurs de la Seconde Guerre mondiale et ne sont plus représentatifs de la situation géopolitique de la planète. Les huit pays ont donc cherché à associer d’autres pays, notamment des pays du Sud, à la gouvernance de la planète et c’est ainsi qu’est apparu le G20, dont la légitimité « pratique » a été conforté par la crise économique. Dans cette architecture élargie, les deux principaux sujets de désaccord concernent la gestion du changement climatique et l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), des questions qui paraissent cristalliser les oppositions. Globalement, il
existe de fortes résistances pour financer la gestion raisonnable du réchauffement climatique. L’économie est devenue mondiale, mais le politique reste encore très fortement national. Ce qui est vrai pour le changement climatique vaut également pour le financement des objectifs du Millénaire.
Tensions sur les biens privés
Tous les biens privés liés à l’énergie (les ressources mais aussi les équipements) génèrent en permanence argent et richesse. Leurs modes de fonctionnement et d’encadrement sont fréquemment associés au pouvoir politique. Une telle proximité entre l’argent et le pouvoir politique n’est pas de nature à favoriser une action vigoureuse contre les effets du changement climatique. Au niveau mondial, la croissance démographique et l’économie à deux vitesses risquent de provoquer des tensions sur la disponibilité des ressources et sur leurs prix. L’énergie, les terres arables, l’eau, la production agricole, les matières premières sont concernées. Dans le contexte de ce que nous avons appelé « le capitalisme débridé », la rareté ou la pénurie des ressources ne feront qu’exacerber les rivalités économiques et politiques, les inégalités de revenus. Ce sont là des sources potentielles de tensions et de troubles sociaux.
La géopolitique de la régulation
La nouvelle crise de l’énergie et le fonctionnement actuel de l’économie mondiale ont un fort potentiel pour générer des conflits et de la violence. Certains conflits de ce siècle seront liés à l’appropriation des ressources naturelles (terres, énergie, eau), d’autres à des inégalités de revenus, à la pauvreté, à la famine. D’autres seront liés au changement climatique et aux migrations forcées associées aux inondations et aux vagues de sécheresse. Ces conflits pourraient être aggravés par le développement du terrorisme et l’utilisation des armes nucléaires ou chimiques. Cette analyse, fondée sur la dialectique des oppositions, renforce les arguments qui plaident en faveur d’un renforcement de la régulation mondiale sous ses différentes formes. La régulation de l’économie mondiale apparaît comme un long et difficile cheminement politique. Nous reviendrons plus loin sur cette question.
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