Le nombre et le volume des neurones
Le nombre et le volume des neurones
Le nombre des neurones atteint environ 100 milliards et non 14 milliards comme on le répète souvent depuis que Donaldson a avancé ce chiffre en 1 892. Comment d’ailleurs faire un compte même approximatif des cellules de type granulaire qui constituent une véritable poussière ?
Non seulement les neurones ne se renouvellent pas, comme nous l’avons dit, mais leur nombre diminue avec l’âge. Signalons qu’il n’en est rien pour les cellules gliales qui, au contraire, présentent des mitoses et même proliféreraient dans le cerveau du sujet âgé.
Dès 1894, Hodge a constaté que les cellules du ganglion spinal diminuent de la naissance à l’âge de 92 ans. Cette constatation a été confirmée par Gardner (1940) : de la 5e à la 7e décennie, la diminution cellulaire est de 30,3 % dans le ganglion spinal. La perte de 32 % des fibres myélinisées des racines spinales associées expliquerait la diminution de la sensibilité vibratoire qui survient avec l’âge.
Hodge constata aussi en 1 894 la diminution avec l’âge des cellules des ganglions spinaux et des cellules de Purkinje, cellules de l’écorce du cervelet qui peuvent être aisément comptées. Ce point fut confirmé chez l’Homme par Ellis (1919-1 920) et Harms (1 927) et chez le rat par Inukai ( 1928) ; elle atteindrait environ 25%. D’après Dayan (1971), la diminution est répartie dans tous les lobes du cervelet.
En ce qui concerne le cerveau, les travaux sont relativement récents ; ils ont porté essentiellement sur l’écorce cérébrale. Andrew et Cardwell( 1 940) découvrirent une diminution évidente de la couche moléculaire de l’écorce cérébrale plus marquée entre 60 et 80 ans. Critchley (1942) et Riese (1946) constatèrent une diminution des cellules pyramidales externes (couche 3) de l’écorce cérébrale.
Les études les plus sérieuses ont été réalisées par H. Brody. Dans un premier travail paru en 1955 , il constata que le nombre des cellules de l’écorce cérébrale diminue mais de façon inégale dans plusieurs aires corticales. La plus importante diminution se situe dans la circonvolution temporale supérieure (centre de l’audition) ; elle atteint approximativement le tiers du nombre existant à l’âge de 19 ans. La moins importante est dans les circonvolutions précentrales (frontale ascendante), occipitales (aire striée centre de la vision) et pariétale ascendante.
H. Brody fit en 1970 une nouvelle étude non plus sur l’ensemble de l’écorce cérébrale mais sur une circonvolution particulière la frontale supérieure (Fl) du pôle frontal. Depuis, sur des prélèvements réalisés sur les cerveaux de sujets indemnes d’affection nerveuse (traités comme dans le travail de 1955 par fixation et coloration au cresyl violet des coupes), la diminution du nombre des cellules est évidente de la 5e à la 9e décennie. Elle existe dans toutes les couches, mais est plus marquée dans les couches 2 et 4 des cellules granulaires externes et internes. Brody confirme la perte des cellules Golgi type II, cellules à axone court, caractéristiques du cortex humain, qu’il avait déjà constatée en 1955 dans d’autres aires corticales.
O. Hunziker (1975) a constaté qu’à l’âge de 80 ans, l’olive bulbaire a perdu 20 % de ses cellules.
À partir des travaux de Brody, il a été calculé que nous perdrions de 10 à 50 000 cellules nerveuses par jour, et davantage après 75 ans I Un rapide calcul aboutit au total impressionnant d’une perte d’environ 30 millions par an, 300 millions au bout de 10 ans et 3 milliards à la centième année, ce qui est impressionnant mais en fait est peu sur les cent milliards de neurones, soit 3/100e. Or nous avons un luxe de neurones et nous n’utilisons pas leurs possibilités incommensurables. Il est à remarquer que les techniques peuvent être cause d’erreurs car le comptage automatique comptabilise aussi bien les cellules gliales que les neurones.Plus que le nombre des neurones importe l’augmentation de leur volume et la multiplication des prolongements et des connexions interneuronales. Elles sont innombrables puisque chacun de nos neurones peut établir plusieurs dizaines de milliers de connexions avec d’autres neurones.
Du point de vue quantitatif, est à rapprocher l’étude faite par M.R. Rosenzweig, E.L. Bennet et M.C. Diamond (Berkeley, Californie, 1972) sur le rôle de l’acquisition des connaissances. Ces auteurs séparent plusieurs groupes de trois rats de même portée. Certains vivent dans une cage spacieuse où l’environnement est enrichi par différents objets avec lesquels ils peuvent jouer. D’autres sont isolés dans une cage dont l’environnement est au contraire appauvri. Au terme de périodes qui durèrent de quelques jours à plusieurs mois, il fut d’abord constaté que les rats issus du milieu enrichi soumis à des tests d’apprentissage se débrouillaient mieux et apprenaient plus vite que ceux qui avaient vécu dans un milieu appauvri. Il fut ensuite observé que l’écorce cérébrale des rats du premier groupe était plus épaisse que celle des rats du deuxième ; les neurones avaient augmenté de volume alors que leur nombre avait diminué « par unité de volume » : leurs dendrites et leurs axones étaient plus ramifiés.
Selon Terry (1980), la perte neuronale n’est pas aussi sévère et diffuse qu’on le dit et ne joue pas un rôle aussi important que la déficience des neuromédiateurs. Il a constaté que, chez les sujets âgés, le nombre total des neurones, la densité neuronale et le pourcentage de surface cellulaire étaient similaires à ceux que l’on trouve chez des sujets moins âgés. Mais avec l’âge le nombre des petits neurones augmente alors que celui des grands neurones diminue. Ceci pourrait expliquer que, sur les coupes, cette atrophie puisse simuler une perte. Il y aurait donc pseudo-perte.
Yves Agid a récemment fait un travail important sur le vieillissement et la mort des cellules nerveuses . Dans certaines structures cérébrales les neurones ne meurent pas, dans d’autres une perte cellulaire en règle modérée est observée. En quoi ce vieillissement nerveux normal diffère-t-il du vieillissement pathologique ? Les maladies dégénératives atteignent plus particulièrement le cortex cérébral (maladie d’Alzheimer), les noyaux gris dopaminergiques (maladie de Parkinson), le cervelet (ataxies cérébelleuses héréditaires), la moelle (sclérose latérale amyotrophique), les nerfs périphériques (maladie de Charcot – Marie Tooth)… Il y aurait dans le cerveau humain trois catégories de cellules nerveuses : Celles qui perdent progressivement leurs fonctions sans mourir (sénescence), celles qui disparaissent de façon lente mais plus rapidement que dans le vieillissement normal (neurodégénérescence), celles qui sont programmées pour mourir.
Vidéo: Le nombre et le volume des neurones
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