Les grains de lumière d'Einstein
Les grains de lumière d’Einstein
Venons-en maintenant à l’énigme du corps noir. Le mystère mis en évidence par Planck en 1900, allait encore s’épaissir, à la lumière – si l’on peut dire – des résultats obtenus, en 1902, par le physicien allemand Lenard. Ces résultats concernaient l’effet photoélectrique, c’est-à-dire la capacité d’éjecter des électrons en soumettant une plaque métallique à l’action de la lumière. On s’attendait à ce que ce phénomène, observé pour la première fois par Hertz en 1887, se produise chaque fois qu’un rayonnement lumineux apportait assez d’énergie pour arracher un électron au métal. Contrairement à cette prévision relevant du bon sens, les expériences de Lenard montrèrent que l’intensité lumineuse, c’est-à-dire l’énergie apportée par seconde par le rayonnement, n’était pas le paramètre important pour provoquer cet arrachement d’électrons. De fortes intensités s’avéraient inefficaces lorsque la lumière était de faible fréquence (le rouge, par exemple), alors que des intensités beaucoup plus faibles provoquaient l’effet photoélectrique à condition que la fréquence de la vibration lumineuse soit plus grande (le bleu ou le violet).
Dans son article de mars 1905, Einstein mit à l’œuvre sa puissance d’analyse, totalement absente de préjugés, pour résoudre ces problèmes liés aux échanges d’énergie entre la lumière et la matière. Une seule hypothèse, mais d’une audace inouïe, lui permit de régler à la fois les énigmes posées par le rayonnement du corps noir et par l’effet photoélectrique. Puisque, d’après Planck, les échanges d’énergie entre la lumière et la matière semblaient ne se produire que par multiples d’une quantité h.f, obtenue en multipliant la fréquence f du rayonnement par une constante h, pourquoi ne pas admettre « tout simplement » que l’énergie transportée par la lumière l’était sous forme de petits paquets, de grains, de valeur justement proportionnelle à la fréquence f.
Une telle hypothèse, se traduit par l’équation :
W = h • f
dans laquelle h est la constante introduite par Planck dans son interprétation théorique de l’émission du corps noir. Einstein lui donne, à juste titre, le nom de « constante de Planck », et ce nom lui restera. Fait remarquable, cette hypothèse des « grains de lumière » permet également à Einstein d’interpréter aisément les résultats de Lenard sur l’effet photoélectrique.
En effet, l’interaction de la lumière avec les électrons de la matière doit être reconsidérée. Ce n’est pas l’apport continu d’un certain flux d’énergie pendant un certain temps qui va aboutir à l’émission d’un électron, mais l’absorption d’un seul grain d’énergie doit être capable de provoquer cette émission. Dans ces conditions, deux cas peuvent se présenter : soit l’énergie transportée par le quantum lumineux est supérieure à l’énergie de liaison de l’électron, et l’effet photoélectrique se produit, soit elle est inférieure et l’effet ne se produit pas. Comme cette énergie est proportionnelle à la fréquence f, c’est ce paramètre qui compte et non l’intensité lumineuse. On retrouve ainsi le fait que les rayonnements violets ou ultra-violets sont plus efficaces que la lumière rouge ou infra-rouge.
Vidéo : Les grains de lumière d’Einstein
Vidéo démonstrative pour tout savoir sur : Les grains de lumière d’Einstein