Les ressources énergétiques : rareté et prix
La concentration des réserves pétrolières et gazières dans un petit nombre de pays qui sont des « pays à risque » est l’un des plus importants déterminants de la géopolitique de l’énergie. L’accès à ces réserves est vital pour l’économie mondiale alors que 80 à 90 % d’entre-elles se trouvent entre les mains d’une trentaine de pays exportateurs
Beaucoup de ces pays, dont la stabilité politique est fragile, peuvent ère considérés comme des pays « à risque ». La « malédiction pétrolière » (ou plus généralement, la « malédiction des ressources ») constitue la principale source de fragilité : l’argent du pétrole et du gaz Étisse le développement économique et corrompt les institutions . La plupart de ces économies, caractérisées par un taux de croissance démographique élevé, sont incapables de suffisamment d’emplois pour les jeunes. Souvent, les inégalités f aggravent et si l’on considère que la population de beaucoup de ces pays est majoritairement musulmane, on peut craindre que la combinaison de la pauvreté, de la frustration et d’un islam radical favorise Le terrorisme national et international.
Face aux pays qui possèdent les réserves, on trouve les pays qui cherchent à accéder aux ressources : l’Asie, dont le niveau actuel de consommation d’énergie par habitant reste faible mais qui dispose d’un énorme potentiel de croissance économique et d’importation de pétrole et de gaz – les États-Unis et l’Europe qui sont de plus en plus dépendants des importations d’hydrocarbures et qui ne peuvent pas remplacer rapidement les énergies importées non renouvelables par des sources d’énergie locales et renouvelables. En regardant plus précisément la carte, on note que l’Asie, avec 4 milliards d’habitants (60 pour cent de la population mondiale), en 2005, et 5.2 milliards d’habitants en 2050, est désespérément à la recherche de pétrole, de gaz naturel et d’eau alors que, juste à sa frontière Nord, la Russie avec une population de 144 millions d’habitants – en diminution – contrôle 30 % des réserves mondiales de gaz, 4,5 % des réserves mondiales de pétrole et dispose par ailleurs d’immenses ressources en eau. Cette carte illustre quelques-uns des plus importants enjeux géopolitiques de ce siècle.
Les réserves de pétrole.
Chaque année, des données sur les réserves de pétrole et de gaz sont publiées par diverses organisations 8. Elles confirment la forte concentration des réserves de pétrole entre les mains d’un petit nombre de pays . En divisant le montant des réserves par la production actuelle, on obtient un ratio (en années), qui est souvent trompeur et mal compris. En 1973, lors du premier choc pétrolier, ce ratio était de 31 ans et certains n’hésitaient pas à affirmer que les réserves mondiales de pétrole seraient épuisées avant 2000, en tenant compte de la croissance de la consommation. Aujourd’hui, ce ratio est de 42 ans. Que s’est-il passé depuis 1973 ? Les techniques d’exploration et de production ont été grandement améliorées grâce à des innovations à diffusion rapide. Le taux de récupération a augmenté de manière significative 9. D’énormes découvertes ont été faites, notamment en mer (mer du Nord, Brésil, golfe du Mexique, côte de l’Afrique de l’Ouest). Une évolution similaire peut être attendue dans le futur pour l’exploration et la production. Le concept de réserves prouvées récupérables garde, par conséquent, une certaine élasticité. Les réserves peuvent être augmentées par l’action combinée de la technologie, des prix et des investissements. Les chiffres des réserves prouvées incluent maintenant les réserves de pétrole non conventionnel : les sables bitumineux du Canada et du Venezuela.
Toutefois, les réserves de pétrole sont, par définition, épuisables, ce qui soulève la question populaire du « pic pétrolier » (peak oil). Quand la production de pétrole commencera-t-elle à décliner ? Quelle sera la rapidité de la baisse ? En période de resserrement de l’offre, de prix du pétrole élevés et volatils, d’anxiété au sujet de la sécurité de l’approvisionnement et de souci pour l’environnement, le débat sur le pic pétrolier fait rage. D’un côté, un groupe qui pourrait être qualifié de « tenants du pic » envoie des signaux alarmistes en avançant que le pic arrivera très vite en raison de facteurs géologiques tout en constatant que l’économie mondiale y est mal préparée. De l’autre, un certain nombre d’experts, dont le Cambridge Energy Research Associates (CERA), présentent une analyse plus détaillée, appuyée sur une énorme banque de données sur les champs pétroliers et gaziers, qui Bdiçoe que la forme et la date du pic seront déterminées
par un grand : facteurs différents .
Seule CERA, un plateau de production apparaîtra – mais pas Au sans que l’offre ne se tarisse du jour au lendemain. Le profil et production mondiale de pétrole prendra alors une forme latitudinaire » avant de baisser lentement. Les ressources mondiales, :conventionnelles et non conventionnelles, resteront suffisante! pc alimenter l’offre. Le CERA estime que les facteurs externes de nature géopolitique – joueront un rôle majeur dans la dÜÉsmnnation de la courbe d’évolution. Comme le dit Daniel Yergin : « Las rrincipaux risques ne sont pas au-dessous, mais au-dessus du » En d’autres termes, la géopolitique compte plus que la
géologie . La gestion principale n’est pas le volume des réserves, mais celle jeter mise en production. Le rythme des investissements à réaliser Jecend fondamentalement du niveau des prix et de la géopolitique qui détiennent les réserves.
Si l’on veut examiner la date et la forme du pic de production de pure Le. un autre facteur doit être pris en considération : les contraintes environnementales. Avec les menaces liées au changement climatiqne. certains grands pays consommateurs d’énergie pourraient être menés à freiner la consommation de pétrole en améliorant l’efficacité eaergétique et en encourageant la substitution des produits pétroliers gaz naturel, les biocarburants ou encore l’électricité (voitures ou ses à moteur hybride rechargeable). Dans ce cas, le pic pétrolier pour : survenir non pas en raison de limites géologiques ou politiques, n,rs par un retournement de la demande en produits pétroliers. Aux £trts-Unis, l’année 2007 pourrait avoir marqué le pic de la demande zessence, et le début de la baisse, qui s’explique par les prix élevés jeu juillet 2008) et le développement des biocarburants de substitu- “ : Yergin, 2008).
Le problème du pic pétrolier peut être expliqué par une illustration simple . L’illustration est simple mais elle est muette sur asiate du pic, car la date et la forme de la courbe de production seront, en fait, modulées par une longue série de facteurs incertains :
la limitation des ressources géologiques (pour chaque champ de production) en relation avec les améliorations technologiques possibles ;
– le prix du pétrole encourageant ou décourageant l’investissement et la demande ;
– les politiques des pays riches en pétrole sur les conditions d’accès aux ressources et sur le développement de leurs capacités productives ;
– les politiques énergétiques des grands pays importateurs de pétrole : les contraintes environnementales, l’amélioration de l’efficacité énergétique, les substitutions inter-énergies, auront des conséquences sur la demande en produits pétroliers ;
– le montant et le calendrier des investissements pour l’exploration pétrolière et la mise en production des gisements découverts ;
– l’impact du progrès technique sur l’exploration, la production de pétrole non conventionnel, la gestion des gisements ;
– l’évolution du taux de récupération des gisements. Il se situe aujourd’hui entre 30 et 35 % et pourrait être considérablement augmenté ;
– des événements géopolitiques et climatiques imprévisibles : guerres, troubles sociaux et politiques, accidents, catastrophes naturelles.
Tous ces facteurs sont qualitativement prévisibles, mais leur calendrier et leur évaluation quantitative restent totalement inconnus. La principale conclusion est très claire : la fin du pétrole n’est pas pour demain mais nous devons nous préparer à l’après pétrole.
Les réserves de gaz naturel
L’économie du gaz naturel a été fondamentalement bouleversée • la rédaction de la première édition du présent ouvrage (2008) ni prise inattendue est le développement massif du gaz non conditionnel aux Etats-Unis12. En 2008, on considérait les Etats-Unis i munie un pays condamné à importer des quantités massives de gaz naturel liquéfié pour faire face à une production déclinante. En 2010, l ‘approvisionnement gazier est assuré par une production croissante non conventionnel (environ 40 % de la production Amérique à un coût relativement faible, et d’aucuns estiment même que les pays pourrait devenir un exportateur net. Le gaz non conventionnel pourrait se développer dans d’autres régions (Pologne, Ukraine, Rus-nin mais le « potentiel de bouleversement » est encore très mal i muni. Les réserves mondiales de gaz naturel sont ainsi en période de i en valuation. Cette intrusion du gaz non conventionnel est de nature Induire des changements dans la problématique énergétique mondiale.
Certes, le transport du gaz naturel est cher (sept à dix fois plus cher que pour le pétrole pour une même quantité d’énergie) et le gaz naturel n’a pas, comme le pétrole, de marché réservé (les carburants), mais l’apparition de grosses quantités de gaz non conventionnel bon marché peut induire des substitutions inter-énergétiques massives : électricité gaz contre électricité charbon ou nucléaire, véhicules gaz contre véhicules essence/gazole.
Comme pour le pétrole, la propriété des réserves de gaz est également concentrée dans un petit nombre de pays, avec toutefois une répartition différente . La Russie possède la part du lion avec environ 30 % des réserves mondiales. 56 % des réserves de gaz se trouvent dans trois pays : la Russie, l’Iran et le Qatar. La Russie vient en premier pour la part mondiale des exportations de gaz (22 %), suivie par le Canada (19 %), la Norvège (11 %), l’Algérie (10 %), les Pays-Bas (7 %), l’Indonésie (6 %).
La Russie détient une position clé dans la géopolitique mondiale du gaz. Pour le moment, la majorité des exportations de gaz russe va vers les pays européens, mais, à moyen terme, si les réserves russes sont développées, la Russie pourrait exporter vers l’Asie et les Etats-Unis sous forme de GNL (gaz naturel liquéfié). Une telle évolution donnerait à la Russie une position exceptionnelle d’arbitrage entre les trois plus grands marchés du gaz. Tous ces éléments et la croissance rapide des échanges de GNL contribuent au développement d’un marché mondial du gaz naturel avec un nombre! croissant du possibilités d’échanges, d’arbitrages et de développement <le nouveaux points d’interconnexion, les hubs gaziers.
Les réserves de charbon
Le charbon est le combustible fossile le plus abondant. A contenu énergétique équivalent, les réserves de charbon sont 11 fois supérieures aux réserves pétrolières . Le ratio réserves/production atteint 133 ans. Les réserves probables pourraient être beaucoup plus élevées. Bien qu’on trouve du charbon dans de nombreux pays, plus de 80 % des réserves sont concentrées dans six pays : les Etats-Unis (28 %), la Russie (18 %), la Chine (13 %), l’Australie (9 %), l’Inde (7 %) et l’Afrique du Sud (5 %). La production est principalement utilisée pour la consommation locale. Toutefois un petit nombre de pays exportent du charbon ; les principaux exportateurs de charbon-vapeur sont l’Australie, l’Indonésie, la Russie et l’Afrique du Sud. Autrefois grand exportateur, la Chine est devenue importatrice nette en 2007.
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