Mythes et rites modernes : La cadence des fêtes sacralise le temps
Les mythes dans la vie quotidienne
Les traductions des mythes dans la vie quotidienne qu’étaient les rites, se sont transformés, dans nos sociétés historiques, en fêtes , qui les mêmes caractères et traduisent souvent la permanence d’anciens mythes. Ces fêtes se répètent à des dates fixes, bien précises, et maîtrisent donc symboliquement l’écoulement du temps, dans la mesure où elles le rythment. Elles constituent des repères. Leur cadence sacralise le temps, l’ordonne en quelque sorte, dans un consensus social qui lui donne son sens et sa force. Ce sont des garants d’une partie de la culture de la société. Ce n’est pas un hasard si les grandes religions ont pris à leur compte les anciennes fêtes païennes, pour leur donner un caractère sacré. Cela avait pour objet d’assurer la cohésion du groupe à travers ce qui pouvait apparaître comme des moments de liberté, mais qui était surtout une volonté de restructuration, de prise en main de la société. C’est le cas, entre autres, des Rameaux, de Pâques, du 1er Mai, de la Saint-Jean, sans parler de Noël.
La fête a parfois un double caractère régénérateur et destructeur. On y vit dans une nouvelle fraternité. C’est l’occasion d’un renversement des interdits, d’une opposition à la vie normale, où les classes sociales sont séparées. Comme le carnaval, qui a lieu, par tradition, à la charnière entre l’hiver et le printemps et forme un rite lié à la disparition du temps mauvais et à l’apparition d un temps nouveau, celui de la fécondité et des beaux jours• Il est l’occasion de représenter dans la joie une caricature de la soeiété, où les institutions sont ridiculisées, où le puissant se retrouve déguisé en pauvre, et inversement, où un chaos organisé, qui laisse une grande liberté de licence, dont chacun profite allègrement, rappelle celui des origines. C’est une violation rituelle des normes sociales. « Une fête, dit Freud, dans Totem et Tabou, est un excès permis, voire ordonné, une violation solennelle d’une prohibition ».
Cette inversion des rôles pendant le carnaval est lié à une volonté parfois inconsciente d’inverser le cours du temps durant les périodes de fêtes. Le temps normal s’arrête, le tei^ips sacré se joue à l’envers. Le carnaval est, comme beaueoup de fêtes.une coutume dont l’origine se perd dans la nuit des temps. Il a succédé aux saturnales et aux bacchanales romaines, mais il est aussi relié au halloween des anciens saxons. L’Église a tenté, à plusieurs reprises, de l’interdire, choquée qu’on puisse y voir, comme cela s’est produit dans plusieurs cathédrales, des ânes entrer dans l’église, portant un homme accoutré en évêque ridiculement déguisé, montant l’animal à l’envers, ou des prostituées déguisées en religieuses. L’Église était aussi opposée aux masques du carnaval, lesquels représentaient parfois des personnages mythiques, car il ne fallait pas toucher à l’image de l’homme telle qu’elle avait été façonnée par le divin.
L’une des fêtes les plus populaires au Moyen Age était celle de l’Épiphanie, ou fête des Rois, qui terminait douze jours de folles festivités, du 25 décembre au 6 janvier, au cours desquelles on se couchait au matin et on se levait le soir. Ces festivités symbolisaient un renversement du temps et de l’ordre des choses, ce qui se traduisait par des mascarades au cours desquelles des enfants se déguisaient en prêtres, disaient la messe à l’envers, les soldats s’habillaient en femmes. Selon la tradition, ces douze jours seraient ceux qui séparent l’année solaire et les douze mois lunaires, et qui sont donc comme hors du temps. De nos jours, le caractère ludique, parfois violent, souvent chaotique des fêtes s’est quelque peu atténué, même s’il subsiste des carnavals très vivants, colorés et fort joyeux, comme ceux de Rio de Janeiro, de Nice ou de Dunkerque. On peut considérer aussi comme des fêtes rituelles les grands rassemblements des jeunes autour de leurs idoles musicales, au cours desquels les démonstrations d’enthousiasme se mêlent à des licences qui ne sont pas sans rappeler les grandes fêtes païennes d’an tan. Plus prosaïquement, le besoin de « faire la fête » reste d’autant plus vif chez beaucoup d’entre, nous que la vie quotidienne devient de plus en plus monotone.
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