Phoques
Les phoques sont apparus il y a plus de 20 millions d’années à partir d’animaux proches des belettes et des loutres. Comme ces dernières, auxquelles ils ressemblaient, les ancêtres des phoques vivaient sur les rives mais chassaient dans l’eau en nageant par des mouvements de godille des pattes arrière et de la queue. De plus en plus aquatiques, ils devinrent également plus pélagiques, ne venant plus à terre que pour se reproduire, et envahirent progressivement toutes les mers du globe à partir de l’Atlantique.
D’abord tropicaux, ils surent s’adapter au cours des derniers millions d’années aux eaux glaciales des régions polaires. On réunit encore souvent les phoques et les otaries dans l’ordre des pinnipèdes (à pied en forme d’aile), mais la controverse fait rage entre les systématiciens, les uns pensant que phoques et otaries sont étroitement apparentés, les autres que seul leur mode de vie les réunit par convergence morphologique.
Phoques boréaux et phoques du Sud
Il y a 10 ou 15 millions d’années, les phoques primitifs se sont scindés en deux groupes, un groupe du Sud, tropical, et un groupe nord-atlantique qui a donné naissance aux dix espèces boréales, européennes et nord-pacifiques actuelles, y compris les trois espèces qui vivent dans des mers ou des lacs fermés.
Après leur apparition, les phoques du Sud se divisèrent en trois groupes aux ciestinées bien différentes : le premier, resté au voisinage des tropiques, est formé par les trois phoques moines actuels ; le second est à l’origine des étranges éléphants de mer, Mirounga angustirostris au nord, et M. leonina au sud; le troisième, enfin, a donné les quatre phoques antarctiques actuels.
L’adaptation à la nage
Les quatre membres des phoques se sont transformés en nageoires courtes et puissantes, où les doigts, armés de fortes griffes, sont réunis par une palmure. Si les membres antérieurs ont toute latitude de mouvement, les postérieurs sont toujours étendus vers l’arrière et, sauf chez le phoque crabier (Lobodon carcinophagus), ne peuvent servir à la locomotion terrestre. Pour optimiser le rendement énergétique de la nage, le corps est fuselé et profilé par réduction de tout ce qui dépasse : c’est ainsi qu’il n’y a pas d’oreilles, le conduit auditif s’ouvrant au ras de la tête dans la fourrure; le pénis est dévaginable par une boutonnière du ventre et les testicules, internes, restent fertiles grâce à leur irrigation par du sang venu des pieds, dont la température est inférieure à celle du corps.
Les phoques nagent en faisant de puissants mouvements de la partie postérieure du corps, les membres antérieurs servant plus de stabilisateurs que de nageoires. Pour lutter contre le froid de l’eau de mer, les phoques ont un pelage serré qui empêche l’eau de lécher directement la peau et une épaisse couche de graisse sous- cutanée. Des vaisseaux sanguins très particuliers, fonctionnant comme des échangeurs de chaleur, empêchent la diffusion de la chaleur corporelle par les extrémités et par la peau.
S’ils voient bien dans l’eau et dans l’air, les phoques ne distinguent pas les couleurs ; dotés en revanche d’une ouïe excellente, ils perçoivent les ultrasons. En plongée, leurs narines et leur pharynx se ferment automatiquement et ils peuvent rester plusieurs dizaines de minutes à des profondeurs atteignant 100 mètres. Leur sang transporte deux ou trois fois plus d’oxygène que celui de l’homme et leurs muscles peuvent, si nécessaire, fonctionner en anaérobiose, tout l’oxygène disponible demeurant réservé au fonctionnement du cerveau.
Les proies des phoques
Tous les phoques sont des prédateurs plus ou moins spécialisés par la taille et la nature de leurs proies. Certains, comme le phoque crabier de l’Antarctique, consomment du gros plancton (le krill), tandis que, dans les mêmes eaux, le léo¬pard de mer (Hydrurga leptonyx) est un redoutable prédateur qui se nourrit d’autres phoques, de manchots et de gros poissons. Tous se nourrissent de proies nageuses ou flottantes, mais certains, tel le phoque barbu (Erignathus barbatus) des côtes de Sibérie, se nourrissent aussi de coquillages, de crabes et d’étoiles de mer prélevés sur le fond marin. Les phoques moines, qui vivent dans les eaux chaudes, le phoque de Weddell (Lepto- nychotes weddelli) de l’Antarctique et l’éléphant de mer austral capturent de grands poissons. Le phoque à capuchon (Cystophora cristata) de l’Atlantique Nord va chercher les grands poissons de fond. Les espèces qui mangent peu de poisson ont un intestin très long, probablement pour faciliter la digestion des coquilles et carapaces.
Des bébés qui craignent l’eau
Les phoques, qui passent pour sociables, le sont surtout à l’époque de la reproduction : suivies de leur progéniture (suitées), les femelles se rassemblent en colonies de mise bas, les mâles mettant à profit l’occasion pour s’accoupler. L’accouplement n’est possible qu’au sevrage du petit, décidé par la femelle avant l’accouplement ou provoqué par celui-ci. La gestation dure apparemment de dix à onze mois, mais le développement embryonnaire s’effectue en réalité en six à huit mois, la division de l’œuf restant bloquée durant plusieurs semaines après l’accouplement.
A leur naissance, les bébés phoques sont couverts d’un pelage spécial, le lanugo, très isolant mais perméable à l’eau. Les petits phoques sont incapables de nager : ils se noient ou meurent de froid s’ils tombent à l’eau. Mères et petits se reconnaissent à l’ouïe et à l’odorat, et une mère ne se laisse en général téter que par son propre petit. L’allaitement dure de deux (phoque barbu) à douze semaines (phoque marbré, Pboca hispida). Le lait est très riche, contenant jusqu’à 400 grammes de matières grasses par litre. Les femelles, qui ne se nourrissent pas durant l’allaitement, maigrissent énormément, tandis que leur petit triple ou quadruple son poids. Abandonné au sevrage, le petit vit sur ses réserves jusqu’à sa mue, qui lui permet d’aller chercher sa subsistance dans l’eau.
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