Pourquoi le noyau n'émet-il pas ses constituants ?
Pourquoi le noyau n’émet-il pas ses constituants ?
Pour répondre à cette question, que nous avons annoncée , il faut commencer par en poser une autre, plus générale : pourquoi certains phénomènes physiques, tels que la chute d’une pomme, l’émission d’un photon par un atome d’hydrogène excité, ou d’une particule par un atome radioactif, se produisent-ils spontanément ?
La réponse est immédiate : c’est parce que le « système de départ » correspond à une énergie, dite potentielle, plus importante que celle du « système final ». Explicitons ces termes à partir de nos exemples. Dans le premier cas, le système de départ est composé de la pomme accrochée à l’arbre et de la Terre, qui exerce sur le fruit la force de gravitation. Le système final, c’est la pomme, parvenue au sol. On démontre aisément que l’énergie potentielle de ce second système est inférieure à celle du premier. La différence d’énergie a servi à donner une énergie cinétique à la pomme au moment de la chute, énergie qui s’est transformée en chaleur, et éventuellement en déformation, au moment où le fruit a percuté le sol.
Dans le cas de l’atome d’hydrogène excité, le système initial est constitué du proton-noyau et de l’électron dans une certaine orbitale et le système final, du même proton et de l’électron dans l’orbitale correspondant à l’état fondamental, c’est-à-dire à l’état de plus faible énergie. L’énergie qui apparaît sous forme de photon est la différence entre les énergies des états initial et final.
L’explication est la même en ce qui concerne l’émission de rayonnements par les atomes radioactifs. L’uranium 238, par exemple, émet une particule α parce que l’énergie potentielle de ce noyau de départ est supérieure à celle du système constitué d’une particule a et du noyau d’arrivée, le thorium 234, ces deux corpuscules étant au repos dans le système du laboratoire, et très éloignés l’un de l’autre. Rappelons que ces énergies potentielles s’obtiennent en multipliant la masse des noyaux considérés par le carré de la vitesse de la lumière, conformément à l’équation d’Einstein. Bien que le nombre de protons et de neutrons correspondant aux systèmes de départ et d’arrivée soient les mêmes, ces systèmes n’ont pas la même masse, parce que les énergies de liaison des nucléons dans les noyaux considérés sont différentes. Comme dans les cas précédents, l’énergie qui apparaît au cours de cette transformation spontanée est la différence entre celles des deux états mentionnés ci-dessus. Dans le cas considéré ici, cette énergie libérée, dite « énergie de la transition », est de 4,3 MeV.
Nous pouvons maintenant en venir à notre question ; pourquoi le noyau d’uranium n’émet-il pas des protons ou des neutrons ?
Ainsi, de façon générale, l’existence même d’un noyau ayant une certaine durée de vie – donc une certaine stabilité – interdit l’émission de ses constituants. Cela signifie que les noyaux radioactifs peuvent être considérés à la fois comme stables et instables. Ils sont stables par rapport à la liaison de leurs constituants. C’est pourquoi ils peuvent survivre des secondes, des années ou même, comme l’uranium 238, des milliards d’années ! Ils possèdent une certaine instabilité, puisqu’il existe des combinaisons pour lesquelles les mêmes nombres de protons et de neutrons correspondent à des énergies plus faibles. Cependant, ils restent dans cet état d’équilibre « instable » un temps plus ou moins long parce qu’il leur faut « trouver le chemin » menant à l’état de plus basse énergie. En termes plus scientifiques, on peut dire que l’uranium 238, par exemple, ne peut transiter vers l’état 234Th + α que par effet tunnel, ce qui correspond à une très faible probabilité par unité de temps.
Le raisonnement que nous venons de faire ici pour la radioactivité α vaut, avec quelques variantes, pour les autres types de radioactivité.
Vidéo : Pourquoi le noyau n’émet-il pas ses constituants ?
Vidéo démonstrative pour tout savoir sur : Pourquoi le noyau n’émet-il pas ses constituants ?