Rhinocéros
L’efficacité comparée du rendement digestif des différents types d’herbivores montre que ceux qui ont un estomac simple et digèrent la cellulose au niveau du cæcum, les périssodactyles (chevaux, tapirs et rhinocéros), sont avantagés par la végétation plutôt fibreuse des forêts, alors que les ruminants (artiodactyles et tylopodes), qui digèrent la cellulose dans un de leurs estomacs (le rumen), tirent bien mieux parti des herbages. Au début du tertiaire, le climat chaud et les forêts abondantes ont favorisé la réussite des périssodactyles, apparus en Asie : ils se sont diversifiés, puis ont colonisé l’Europe et l’Amérique du Nord.
La fin du paradis tropical
La grande cassure» s’est produite il y a 38 millions d’années : le climat du globe s’est considérablement transformé, surtout dans l’hémisphère nord, avec l’apparition d’une alternance de périodes chaudes et froides, les saisons. Les ruminants ont commencé à se développer à cette époque, tandis que les périssodactyles produisaient des formes géantes, dont les premiers rhinocéros : le plus grand d’entre eux était sans conteste le baluchithérium, qui atteignait 5 mètres au garrot! Si étonnant que cela puisse paraître, les animaux plus grands consomment en effet moins d’énergie et supportent plus facilement les intervalles durant lesquels la nourriture est pauvre.
Le miocène, il y a 20 millions d’années, a vu apparaître les graminées et le développement des prairies favorables aux paisseurs (ruminants et équidés mangeurs d’herbes), qui ont pu proliférer. La régression des forêts a été fatale aux équidés brouteurs (mangeurs de rameaux, de bourgeons et de feuilles), et a repoussé les rhinocéros eurasiatiques vers les forêts du Sud, où ils vivent encore. En Amérique du Nord, cette migration vers le sud n’a pas été possible : l’Amérique néotropicale était encore isolée, et les rhinocéros n’ont pas survécu.
Des géants paisibles et peureux
Les cinq espèces survivantes de ce groupe (rhinocérotidés), autrefois aussi diversifié que le sont les antilopes actuelles, ont toutes une mauvaise vue, ce qui explique probablement leur caractère versatile. Les rhinocéros d’Afrique ont perdu leurs incisives, alors que leurs cousins asiatiques les ont conservées. Le rhinocéros de Sumatra a encore des canines, qui manquent dans les autres espèces. Tous les rhinocéros ont des membres épais à trois doigts, et tous aiment l’eau et la boue, où ils se vautrent pour se débarrasser de leurs parasites.
La gestation dure environ quinze mois, sauf pour l’espèce de Sumatra (de 7 à 8 mois). L’arrivée à maturité sexuelle tardive (6 à 8 ans), les gestations espacées (tous les 2 â 4 ans) et la mise bas d’un seul petit, ne favorisent pas le renouvellement des effectifs.