crocodiles, alligators et crocodiliens
Lorsqu’il décrivit «le» crocodile, Linné le classa dans le genre Lacerta, qui comprenait, en outre, plusieurs lézards et la salamandre. On sait que le naturaliste suédois ne s’intéressait guère aux reptiles, pourtant les anciens égyptiens distinguaient déjà parfaitement les crocodiles des lézards de la famille des varans. Linné voulait ainsi souligner que ces différents animaux ont une conformation analogue : celle du vertébré tétrapode primitif, préservée notamment chez les urodèles, de nombreux sauriens et les crocodiliens.
Un prédateur astucieux
Les crocodiles, néanmoins, sont bien distincts et bien individualisés. Ils se reconnaissent à leur peau fortement écailleuse, plus ou moins renforcée par des inclusions osseuses, ou ostéodermes. Un palais secondaire isole les fosses nasales de la bouche, et un ensemble de clapets, l’un prolongeant en arrière ce palais osseux, l’autre prolongeant la langue, permet d’isoler la cavité buccale de la trachée : le crocodile peut ouvrir la bouche et avaler une proie sous l’eau sans noyer ses poumons. Cet avantage est complété par la faculté qu’ont les crocodiles de fermer, grâce à des valvules, leurs narines externes. Les dents sont placées dans des alvéoles des os des mâchoires, et sont remplacées plusieurs fois au grosse pour être avalée sur-le-champ, le crocodile l’entraîne en eau profonde, après l’avoir étourdie, et la noie en tournant plusieurs fois rapidement sur lui-mê- me. Les dents pointues de ses puissantes mâchoires maintiennent solidement la victime, mais ne permettent guère sa mastication : la proie trop volumineuse est placée dans un »garde-manger» immergé où le prédateur attendra qu’elle se décompose pour la consommer.
Les crocodiliens pondent des œufs – de 10 à 80 selon l’espèce -, qu’ils déposent dans un nid plus ou moins élaboré et consolidé de débris végétaux; le plus souvent, la femelle surveille sa ponte et la défend contre d’éventuels prédateurs ; elle aide les nouveau-nés à quitter leur coquille et semble même communiquer avec eux par divers cris.
A l’âge adulte, les crocodiles ont peu d’ennemis, mais les œufs et les jeunes sont chassés par de nombreux prédateurs. L’homme, qui apprécie notamment leur cuir, demeure leur principal ennemi, mais d’efficaces techniques d’élevage sont aujourd’hui mises en place, qui permettront peut-être de sauver de l’extinction prochaine les espèces les plus menacées, le crocodile des Philippines, par exemple.
Crocodiles, alligators et caïmans
Les crocodiliens habitent les zones humides tropicales de tous les continents, ainsi que certaines îles océaniques ; deux espèces seulement (les alligators) fréquentent des climats relativement tempérés et se sont adaptées aux saisons froides. Les ancêtres des crocodiles actuels étaient déjà bien différenciés au trias (200 millions d’années), et les espèces du crétacé (75 millions d’années) ne différaient guère des formes rencontrées actuellement. C’est au jurassique 150 millions d’années) que le groupe serpble avoir connu sa plus forte extension, par l’aire de répartition couverte comme par le nombre d’espèces reconnues.
Les crocodiliens actuels comptent trois familles (quelquefois considérées comme des sous-familles) : les alligatoridés (ou alligatorinés), les crocodilidés (ou crocodilinés) et les gavialidés (ou gaviali- nés). Extérieurement, les gavialidés – une seule espèce, le gavial du Gange (Gavia- lis gangeticus) – se reconnaissent à leur museau extrêmement étroit; crocodilidés et alligatoridés se distinguent par la façon dont la quatrième dent de la mandibule se loge dans la mâchoire supérieure : cette dent particulièrement développée entre dans une encoche chez les crocodilidés (elle demeure donc visible quand la bouche est close) et dans une cavité chez les alligatoridés (elle n’est plus apparente lorsque le reptile a refermé ses mâchoires).
Les alligatoridés (4 genres : Alligator, Caiman, Melanosuchus, Paleosuchus, et 8 espèces) peuplent le Nouveau Monde, une seule espèce, certainement relictuel- le, vivant en Chine orientale. Les crocodilidés (3 genres : Crocodylus, Osteolae- mus, Tomistoma, et 15 espèces) sont distribués en Amérique, en Afrique, en Asie et en Australie.
Des reptiles géants
Considérablement moins imposants que leurs lointains parents les dinosaures, certains crocodiles sont pourtant les plus lourds des reptiles actuels : quelques espèces atteignent 6 mètres de long, et le crocodile marin (Crocodylus porosus) peut dépasser 7 mètres pour un poids de 1 tonne.
Dans un tel domaine, les records sont sujets à caution, mais, en se fondant notamment sur les dimensions de crânes gigantesques, certains auteurs estiment que quelques individus auraient pu mesurer jusqu’à 10 mètres de long pour une masse de 2 tonnes.
De telles dimensions, de toute façon, ne se rencontreront vraisemblablement plus car les crocodiles, partout où ils sont encore présents, sont intensivement pourchassés; comme les autres reptiles, ce n’est qu’à un âge très avancé qu’ils peuvent être de taille exceptionnelle, et les plus vieux individus ont été décimés.
A l’autre bout de l’échelle, trois espèces des forêts équatoriales ont 2 mètres de long au plus : le crocodile nain d’Afrique et les deux caïmans nains d’Amérique méridionale (genre Paleosuchus). La plus petite espèce est certainement P. palpehrosus : les mâles adultes mesurent 1,50 m, les femelles 1,20 m seulement. Plusieurs espèces de lézards dépassent largement de telles dimensions.
Vidéo : crocodiles, alligators et crocodiliens
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