Energie nucléaire et déchets radioactifs : la fusion
La fusion
On sait depuis longtemps que la fission, scission d’un noyau lourd en deux noyaux de masse moyenne, n’est pas le seul moyen de libérer de l’énergie nucléaire. Une réaction apparemment opposée, la fusion de deux noyaux très légers en un noyau plus lourd, peut aboutir au même résultat. C’est ce type de processus qui est à l’origine de la formidable énergie dégagée par les étoiles, et en particulier par notre Soleil.
Les réactions de fusion les plus accessibles sont présentées dans l’encart ci-après, Elles mettent en jeu les isotopes lourds de l’hydrogène, c’est-à-dire le deutérium D et le tritium T. Prenons l’exemple de la réaction
D + T à 4He + n
où, rappelons le, les symboles n et 4He désignent respectivement le neutron et le noyau d’hélium ou particule a Deux caractéristiques principales distinguent une telle réaction de la fission :
– elle se produit par interaction de deux noyaux chargés positivement ;
– il ne s’agit pas d’une réaction en chaîne.
Pour que la fusion s’amorce et se perpétue, il est indispensable de communiquer aux deux protagonistes, le deutérium et le tritium, une énergie cinétique suffisante pour qu’ils puissent vaincre l’énergie de répulsion électrostatique. Cela peut être fait au laboratoire, et l’a été pour toutes les réactions de fusion, en utilisant des accélérateurs de particules, mais de tels procédés ne sont pas rentables pour la production d’énergie à l’échelle industrielle. Dans cette dernière optique, les techniques envisagées consistent à utiliser la vitesse d’agitation thermique de ces atomes, ou plutôt de ces ions d’hydrogène pour provoquer leurs collisions. Comme de grands nombres de noyaux doivent être concernés par ces réactions nucléaires, il est nécessaire de confiner fortement le mélange correspondant (deutérium-tritium, par exemple), et ceci pendant un temps suffisamment long. Trois catégories de méthodes visent à atteindre cet objectif :
– Dans la première, utilisée pour les bombes thermonucléaires (bombe H), c’est l’explosion d’une bombe atomique à fission qui élève la température du mélange des
deux isotopes d’hydrogène, leur communiquant une vitesse d’agitation thermique suffisante pour que la fusion puisse avoir lieu. Cette méthode, la seule ayant abouti à ce jour à une production significative d’énergie, ne peut évidemment pas être utilisée à des fins industrielles.
– Dans la seconde, mise en œuvre dans de gros équipements appelés « tores », ou « tokomaks », ces isotopes d’hydrogène sont confinés à l’état d’ions sous l’effet d’un champ magnétique toroïdal. Dans ces sortes de « bouteilles magnétiques » on injecte de grandes quantités d’ions, ce qui conduit à des densités et à des températures considérables.
– Dans la troisième, qualifiée de « fusion inertielle », on a recours à l’impact de multiples faisceaux de photons laser ou d’ions lourds pour échauffer, et surtout comprimer de façon considérable, le mélange D + T pendant un temps très court mais suffisant pour provoquer l’allumage (ignition) de la fusion, la chaleur dégagée par le processus étant suffisante pour que la combustion totale du mélange se réalise.
La fusion par confinement magnétique et la fusion inertielle font actuellement l’objet de recherches très actives. La fusion « magnétique » a déjà obtenu des résultats prometteurs, sur le dispositif « JET », pour « Joint European Torus », installé en Grande-Bretagne, ce qui a conduit à l’élaboration d’un projet mondial, intitulé « ITER », ce qui signifie « International Thermonuclear Experimental Reactor ». Cette magnifique machine sera implantée à Cadarache, dans les Bouches-du-Rhône, ce qui couronne les efforts prodigués dans ce domaine par la France, et en particulier par le Commissariat à l’énergie atomique depuis des décennies. Ce prototype pourrait vraisemblablement parvenir à une production d’énergie supérieure à l’énergie injectée, mais la production industrielle d’électricité par la réaction deutérium + tritium n’est généralement pas envisagée avant le milieu du xxie siècle. Un tel exploit ne devrait cependant constituer qu’une première étape, car c’est l’utilisation de la fusion deutérium + deutérium qui libérera véritablement l’homme des problèmes de ressources énergétiques. En effet, seul le deutérium est abondant dans l’eau de mer, le tritium devant être préparé par réaction nucléaire de neutrons sur l’isotope 6 du lithium :
n + 6Li àT + 4He,
soit dans un réacteur nucléaire spécialement dédié à cette production, soit en disposant une couverture de lithium dans l’enveloppe du tore pour profiter directement des neutrons résultant de la réaction de fusion , comme cela est prévu dans le projet ITER. Dans les deux cas, il est nécessaire de disposer de la matière première 6Li, ce dont il serait très agréable de s’affranchir.
Cette seconde étape nécessitera de grands progrès technologiques supplémentaires et ne devrait donc pas voir le jour avant le début du xxne siècle.
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