Le temps du vivant : Les donneurs de temps
Au quotidien, cette horloge interne principale a besoin d’être constamment remise à l’heure, pour s’adapter à la durée du jour, perpétuellement changeante. Cela se fait sous l’effet de ce qu’on appelle un « donneur de temps », lié à l’alternance de la lumière et de l’obscurité, soit le soir au crépuscule, soit le matin à l’aube, suivant les espèces. Ce système n’existe pas à la naissance, chez le petit d’homme, il se met en place peu à peu, avec l’installation du rythme veille-sommeil, lequel n’existe pas encore chez le nouveau-né humain, qui dort beaucoup. Il n’est réellement installé que vers l’âge de quatre ou cinq ans. Cette synchronisation quotidienne se fait dans la glande pinéale, située dans le cerveau, par l’intermédiaire de l’œil, l’organe sensible à la lumière, mais cette synchronisation passe par des circuits différents de ceux de la vision. Les donneurs de temps ne créent pas les rythmes biologiques. Ils fournissent aux organismes vivants des signaux qui leur permettent de régler leurs horloges internes. Ce sont des repères temporels, qui permettent aux animaux – et aux hommes – de s’ajuster en permanence aux variations de l’environnement.
Chez les animaux malades auxquels il faut enlever les yeux, la synchronisation des horloges internes ne peut plus se faire, et ils souffrent de troubles que l’on corrige partiellement en leur administrant des hormones spécialisées. Chez certaines espèces,on a localisé des récepteurs sensibles à la lumière sur la peau. On a cru en voir aussi dans le creux interne du genou, mais ces observations sont controversées. Il semble, en fait, qu’il existe des oscillateurs accordés au rythme d’environ vingt-quatre heures dans bien d’autres organes que le cerveau : les biologistes en ont découvert, avec surprise, dans le cœur, le foie, les poumons, des muscles. On s’est également aperçu récemment que ces oscillateurs étaient sensibles à la façon dont les animaux se nourrissaient. Il existerait un système d’anticipation vis-à-vis de la nourriture, lié à d’autres horloges internes que l’horloge principale, suivant des modalités qu’on connaît encore mal. Les chercheurs du laboratoire des rythmes de Strasbourg estiment que la restriction de nourriture formerait aussi un « donneur de temps » pour des rythmes essentiels de l’organisme de certains animaux.