Les expériences hors du temps
Les expériences hors du temps dans les souterrains
Des hommes et des femmes ont volontairement vécu hors du temps, lors d’expériences dont certaines ont été menées pour préparer les longues missions dans l’espace, ou celles, effectuées dans un confinement total, à l’intérieur des sous-marins porteurs d’engins nucléaires. Certaines de ces expériences ont été faites dans des caissons isolés, d’autres sous terre, dans des cavernes. Le spéléologue Michel Siffre a été, en France, le pionnier de ces séjours hors du temps, dans les années 1960, en effectuant la première tentative de vie souterraine de longue durée, deux mois, et il a raconté ses impressions, comme celles de ses compagnons spéléonautes, ainsi qu’il les appelle. Dès les premiers jours de leur confinement, ils ont ressenti une désorientation temporelle – ils n’avaient, bien entendu, pas emporté leurs montres. Ils ne parvenaient plus à estimer la durée. La plupart ont réussi assez vite à s’adapter en se basant sur leurs besoins physiologiques, et notamment sur leur sommeil. Mais cela a conduit à des erreurs d’appréciation parfois considérables, car la durée de ce sommeil, ainsi que l’heure d’endormissement ou de réveil se sont modifiées au cours du temps de confinement et ont beaucoup varié selon les sujets. Chez certains, le rythme veille- sommeil est passé parfois, de vingt-quatre à quarante-huit heures et plus rarement, à soixante-douze heures. Michel Siffre a mené aux États-Unis une expérience au cours de laquelle il a cherché, sans succès, à faire passer son rythme de vingt-quatre à quarante-huit heures, afin de démontrer que l’on pouvait être actif vingt-six heures et dormir douze heures, ce qui intéressait vivement les militaires et les responsables de l’Agence américaine de l’espace. Mais il semble qu’on ne puisse modifier à ce point nos rythmes naturels et notamment celui, fondamental on l’a vu, lié à une période voisine de vingt-quatre heures.
Les spéléonautes ont souvent fait de graves erreurs sur l’estimation de leur temps de confinement. A son cinquante-huitième jour sous terre, lors de sa première expérience, Michel Siffre croyait avoir vécu pendant trente-six jours. Il pensait dormir sept heures, alors qu’il dormait en réalité neuf heures. Au réveil, il tentait d’évaluer le temps en fonction de ses activités,ce qui se révéla exact pendant une dizaine de jours. Puis brusquement, à partir du douzième, il sous-estima les durées. Cela coïncida avec une activité moindre, donc la diminution du nombre de repères. La perte de la notion de temps s’accompagna, chez lui, de pertes de mémoire. Ce fut le cas des volontaires soviétiques enfermés pendant quarante-cinq jours dans leur « chambre de silence » pour préparer les longs vols dans l’espace. « Je ne me rappelle pas de ce qui s’est passé avant- hier » dit l’un d’eux. Et un autre : « Parfois, nous sommes incapables de nous souvenir du menu de la veille. »
Josie Laurès, qui resta quatre-vingt-huit jours sous terre, vit son cycle menstruel troublé : ses règles, qui venaient tous les vingt-neuf jours, très régulièrement, apparurent la première fois après vingt-huit jours, la seconde après trente-cinq jours, la troisième après vingt-quatre jours. C’est à ce moment qu’elle se rendit compte qu’elle avait complètement mésestimé le temps : elle se croyait le 6 février et ne comprit pas pourquoi ses règles intervenaient une semaine après les précédentes. C’est qu’on était en réalité le 26 février ! Plusieurs autres activités hormonales ont également été perturbées lors de ces expériences, davantage que le temps de sommeil. Un psychologue montra que la mauvaise estimation du temps coïncidait aussi avec une diminution de la vigilance, ce qui suscita à l’époque beaucoup d’intérêt chez les spécialistes américains et soviétiques des vols spatiaux.
Vidéo: Les expériences hors du temps
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