Les rythmes humains : pourquoi le doigt s'arréte-t-il de pousser ?
Il est tout à fait passionnant de constater que les rythmes imprègnent la totalité de l’organisme : il en existe déjà au niveau de l’élément constitutif de tout être vivant, la cellule. On observe chez des êtres faits d’une seule cellule, comme les bactéries, des oscillations rythmiques, qui semblent dépendre d’un système à compter le temps. C’est sans doute un système du même ordre qui stoppe les divisions de nos cellules lorsqu’elles ont fini de former des tissus -afin d’arrêter, par exemple, la fabrication d’un doigt ou d’un organe. Comment !’organisme sait-il qu’il faut cesser de fabriquer du tissu vivant ? Qu’un organe est achevé ? Cela ne s’explique que si l’on admet que le système de fabrication de cellules et de tissus est sous la dépendance d’une horloge qui tient compte du nombre de divisions cellulaires, car, au niveau des cellules, la comptabilité du temps se fait en fonction du nombre de ces divisions. On suppose donc que l’organisme sait que le doigt a fini de pousser lorsque se sont produites un nombre donné de divisions de cellules.
On commence, parallèlement, à comprendre ce phénomène, tout aussi surprenant, qui fait que tous les êtres humains – comme les animaux – se développent de manière régulière, en un temps donné, toujours le même, pour aboutir à une structure complexe, toujours identique, compte tenu des différences individuelles, et qui s’installe de façon généralement correcte. Cette construction s’accompagne toujours de destructions : l’embryon possède une ébauche de queue, qui va disparaitre, de même que les tissus palmés qui font se rejoindre, chez le fœtus, les doigts de ses mains et de ses pieds. Rien d’autres organes seront remodelés lors de la vie embryonnaire, par cette destruction de cellules et de tissus et leur remplacement par d’autres.
Même le cerveau sera ainsi modifié : des liaisons entre les cellules nerveuses naissent, puis disparaissent. Après la naissance, des groupes entiers de neurones sont ainsi détruits, rem- placés par d’autres. C’est ce qui explique, nous le verrons en détail plus loin, pourquoi nous ne pouvons avoir de souvenirs de la toute petite enfance : enregistrés par ces neurones, ils disparaissent avec eux. Une preuve de ce fait est apporté par les autistes, ces enfants qui souffrent d’un trouble du développement, probablement génétique, qui les empêche d’avoir des relations de communication avec leur environnement. Ils ont un poids et un volume cérébral anormalement élevés, qui proviendraient de la persistance de cellules et de connexions qui auraient dû normalement disparaître. Elles encombrent le cerveau et empêchent les connexions normales de se faire, provoquant le trouble profond de l’autisme.