Pétrole : La chine
La chine
Depuis les réformes économiques lancées en 1978, la Chine a connu un décollage économique incontestable, devenant en quelques années le premier producteur mondial de biens manufacturés. Parallèlement, le niveau de vie moyen des Chinois s’est amélioré, tandis que la part des Chinois vivant en ville passait de 18 % en 1978 à 40 % en 2000.
Mais alors que le pays se dessine aujourd’hui comme une véritable puissance économique et industrielle, sa dépendance énergétique le fragilise. Son énorme machine industrielle ainsi que l’importance de sa population ont engendré une demande croissante en énergie, parallèlement à la diminution de ses réserves.
C’est le secteur industriel qui représente la majeure partie (70 %) de sa consommation énergétique, les 30 % restant étant destinés à alimenter son urbanisation massive et les conséquences de l’augmentation du pouvoir d’achat des ménages chinois, qui s’équipent désormais d’automobiles et d’appareils électroménagers, l’ensemble de ces facteurs entraînant des besoins énormes en électricité (que la Chine n’arrive d’ailleurs pas toujours à assouvir, comme en témoignent les pannes occasionnelles d’électricité).
C’est pourquoi la Chine est devenue le deuxième consommateur d’énergie après les Etats-Unis ; ses besoins énergétiques, qui représentaient 10 % de la demande mondiale en 2000, devraient atteindre 20 % en 2020.
Actuellement, la Chine fait partie des premiers consommateurs mondiaux de zinc, fer, cuivre, étain, acier, mais aussi d’aluminium et de plomb. Le pays est particulièrement dépendant du pétrole, qui représente 27 % de ses besoins énergétiques ; la Chine est ainsi devenue en 2002 le deuxième importateur mondial de pétrole après les Etats-Unis, l’essentiel provenant du Moyen-Orient. La consommation chinoise de pétrole a augmenté de 66 % entre 1986 et 1995, contre 9 % aux Etats-Unis. Atteignant 308 millions de tonnes en 2004, elle devrait être multipliée par deux d’ici à 2020. Selon l’AIE, dans l’hypothèse d’un maintien du rythme de la croissance chinoise, le pays devrait importer 82 % de sa consommation de pétrole en 2030. En revanche, la demande chinoise en matière de gaz est encore faible, puisqu’elle équi¬vaut actuellement à la consommation française, soit 40 milliards de m3. Elle devrait néanmoins doubler pour atteindre 80 milliards de m3 d’ici à 2020, surtout sous forme de GNL, en provenance sans doute des pays du golfe Arabo-Persique. La Chine ne reste toutefois pas inactive et, outre les importations, renforce peu à peu son potentiel énergétique en développant le recours au nucléaire et à l’hydroélectricité, comme en témoigne la construction du barrage géant des Trois Gorges, sur le Yangzi liang.
Le défi de la sécurité énergétique
Comme les Etats-Unis ou les pays de l’Union européenne, la Chine s’inquiète des consé-quences de sa nouvelle dépendance énergétique, et ce d’autant plus que celle-ci est particulièrement forte et bien plus importante que dans les autres pays consommateurs. La Chine redoute aussi bien une hausse brutale des prix des hydrocarbures qu’une rupture soudaine des approvisionnements et souffre de l’incertitude qui pèse sur les voies d’acheminement, de plus en plus vulnérables. Ces situations seraient en effet susceptibles de provoquer, sur une période plus ou moins longue, la paralysie du pays. En effet, comment faire fonctionner ses usines et respecter les contrats commerciaux en cas de pénurie d’énergie ? Comment réagirait la population, encouragée par ailleurs à consommer et à s’endetter pour acheter logements et biens de consommation, si les autorités chinoises étaient obligées de restreindre, de façon autoritaire, la consommation électrique ou la circulation des véhicules ?
C’est pourquoi la Chine a, ces dernières années, particulièrement privilégié la sécurisation énergétique. Une autre préoccupation fait l’objet des attentions chinoises : la rivalité avec les Etats-Unis, omniprésents dans le domaine énergétique, notamment dans le contrôle des routes maritimes. Comment réagir en cas de crise diplomatique avec Washington, notamment au sujet de Taiwan, que Pékin entend toujours rattacher officiellement à la Chine continentale ? Par leur présence sur le trajet des hydrocarbures, les Etats-Unis disposent de moyens de pression que Pékin entend désormais contourner.Pour répondre à toutes ces inquiétudes, la Chine s’est attachée à renforcer ses liens avec ses pays fournisseurs tout en diversifiant ses sources d’approvisionnement. Elle a également veillé à sécuriser ses voies de transit d’hydrocarbures, notamment en privilégiant l’option du transit terrestre.
Les partenaires de la Chine: Le Moyen-Orient
Les échanges entre la Chine et l’Arabie Saoudite ont augmenté ces dernières années, les importations chinoises de pétrole saoudien passant de 2,5 millions de tonnes en 1999
à 11 millions de tonnes en 2003. Depuis, et compte tenu des distances prises par les Américains à l’égard des importations de pétrole saoudien, suite surtout aux attentas du 11 septembre, les liens entre Pékin et Riyad se sont renforcés. Ces liens se traduise » non seulement par l’accroissement de la quantité de pétrole exporté à destination de a Chine et par l’autorisation accordée à Pékin d’explorer les champs gaziers saoudiens du Rub al-Khali, mais aussi par les investissements réalisés par la compagnie saoudienne Saudi Aramco dans la modernisation de raffineries de la province du Fujian, au sud de la Chine. Actuellement, l’Arabie Saoudite est le deuxième fournisseur énergétique de a Chine après l’Iran, puisqu’elle représente 12 % des importations chinoises de pétrole. Le partenariat entre les deux pays devrait s’accroître dans les prochaines années, tant a_ niveau des importations chinoises que des investissements saoudiens en Chine.
Les régimes mis au ban de la communauté internationale, tels que l’Iran, l’Irak, la Libye ou le Soudan, n’ont jamais fait peur à Pékin, qui les a même particulièrement recherchés puisqu’ils présentaient l’avantage d’être souvent l’objet d’embargos américains, voire des Nations unies. Ainsi, c’est vers l’Irak des années 1990, objet des sanctions onusiennes que s’était portée l’attention de la Chine.
Ainsi, en 1997 la CNPC avait conclu un important contrat avec Saddam Hussein porta sur l’exploitation du champ pétrolier d’AI-Ahdab, situé au sud de la capitale irakienne D’autres accords étaient en discussion, mais l’intervention des Américains en Irak CL printemps 2003, suivi du renversement du régime de Saddam Hussein, devaient reporter la réalisation des contrats signés par la Chine avec Bagdad. Depuis, Pékin a étabi des relations avec le nouveau gouvernement irakien et tente de faire reconnaître la validité des accords conclus avec l’ancien régime. Il est fort probable que la Chine devienne dans les prochaines années, un partenaire important de l’Irak, surtout pour le développement et la commercialisation des hydrocarbures du pays.
Profitant de l’embargo décrété par les Américains à l’égard de l’Iran, notamment par le biais de l’Iran and Libya Sanctions Act de 1996, les Chinois ont opéré un rapprochemen: avec Téhéran au cours des années 1990. Les exportations de pétrole iranien à destination de la Chine sont ainsi passées de 1 million de tonnes en 1993 à plus de 13 millions de tonnes en 2003, soit 13,6 % du total des importations chinoises, et devraient continuer à augmenter dans les prochaines années, puisque le gouvernement chinois annon¬çait en 2005 son intention d’investir 100 milliards de dollars au cours des 25 prochaines années dans le secteur iranien des hydrocarbures. Pékin espère aussi développer un projet d’oléoduc reliant l’Iran à la mer Caspienne, qui lui permettrait de bénéficier d’une nouvelle voie de transit terrestre pour ses approvisionnements énergétiques. Mais les ambitions chinoises à l’égard de l’Iran se heurtent actuellement à la crise internationale majeure provoquée par le programme nucléaire iranien ; dans cette affaire, un soutien de Pékin à Téhéran pourrait lui attirer bien des ennuis avec ses autres partenaires commerciaux, notamment occidentaux, et risquerait de ternir son image auprès de la communauté internationale. La Chine demeure donc prudente à l’égard de ce dossier, et donc s’abstient de manifester un réel soutien à Téhéran malgré ses aspirations énergétiques.
Enfin, la Chine importe du pétrole en provenance du sultanat d’Oman (11,3 % de ses importations de pétrole en 2004, ce qui est très important), et réalise aussi des échanges commerciaux avec l’Egypte, la Syrie et le Yémen.
Les pays de la CEI
Depuis les années 1990, la Chine s’intéresse aux gisements d’Asie centrale, et surtout à ceux du Kazakhstan. En 1997 la compagnie chinoise CNPC avait réalisé avec succès l’achat de 60 % des parts de la compagnie nationale Aktyubinsk Oil et obtenu les droits exclusifs de plusieurs champs pétroliers kazakhs. Six ans plus tard, elle prenait le contrôle total de la compagnie nationale kazakh. En 2003, la Chine avait déjà importé près d’un million de tonnes de brut du Kazakhs¬tan, par voie ferroviaire. Mais comme l’approvisionnement terrestre par le rail coûte cher, les Chinois encouragent la construction d’oléoducs.
Les négociations se sont multipliées entre les deux pays au sujet de l’approvisionne¬ment de la Chine en pétrole et en gaz kazakh, via des pipelines, actuellement en cours de construction. En 2004 a été lancée la construction d’un premier oléoduc reliant Atasu, au nord-ouest du Kazakhstan, à Alashankou, en Chine, d’une distance de 1 240 kilomètres, cet oléoduc devant ensuite être agrandi.
Le pétrole kazakh ainsi importé (10 millions de tonnes par an dans un premier temps, puis le double dans les prochaines années) doit être raffiné dans les installations chinoises de la région autonome du Xinjiang, à l’ouest du territoire chinois. Un gazoduc est également prévu à destination de cette région, en plein développement économique malgré les velléités indépendantistes de sa minorité Ouïgour. En matière énergétique, la Chine investit également dans d’autres républiques de la région, dont l’Ouzbékistan et le Turkménistan et, plus à l’ouest, l’Azerbaïdjan, autre pays riverain de la mer Caspienne, situé dans la région du Caucase.
Les relations entretenues par la Chine avec les pays d’Asie centrale ont également une motivation d’ordre stratégique, puisqu’il s’agit de contrer l’influence américaine dans la région. Pékin oeuvre ainsi avec Moscou au développement de la Shanghai Cooperation Organization, dont font également partie le Kazakhstan, le Kirghizstan, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan, opposée au renforcement de la présence américaine en Asie centrale
depuis les attentats du 11 septembre 2001 et l’intervention en Afghanistan au cours des mois suivants. En juillet 2005, cette organisation avait demandé le retrait des forces américaines de la région, ce qui serait un avantage pour la Chine qui développe d’ores et déjà sa présence militaire dans plusieurs pays d’Asie centrale.15
Les relations avec la Russie, bien que difficiles pendant une trentaine d’années, avaient commencé à se rétablir dès 1989 avec la visite à Pékin de Mikhaïl Gorbatchev. Depuis la disparition de l’URSS, les relations se sont maintenues et des négociations ont été entreprises, notamment dans le domaine énergétique.
C’est pourquoi, dans les années 1990, des contrats ont été signés avec la Russie, mais ils demeurent depuis incertains, et ce d’autant plus que persiste une certaine méfiance entre les deux pays. Ainsi, la Chine avait conclu avec le groupe loukos la construction d’un oléoduc de 2 400 km reliant Angarsk, en Sibérie, à Daqing, au nord-est de la Chine, mais cet accord devait être reporté en 2004, Moscou ayant condamné la compagnie russe (voir plus haut la Russie). La Russie avait alors paru privilégier la proposition japonaise, en concurrence avec celle de la Chine, visant à construire un oléoduc reliant Taishet au port de Nakhodkha. Récemment, la position de Vladimir Poutine avait évolué en faveur de la Chine, le président russe assurant que l’oléoduc à destination du japon ne serait pas réalisé avant que ne soit construit celui à destination de la Chine, vers 2008.
Outre le pétrole sibérien, la Chine profite également des immenses gisements gaziers russes, tels que ceux de Sakhaline. Ainsi, la visite du président Poutine en Chine, en mars 2006, a été l’occasion d’annoncer le projet d’un raccordement entre les deux pays avec la construction de deux gazoducs d’une capacité de 40 milliards de m3 d’ici à 2011.
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