Les autres fibres naturelles végétales : La ramie: la ramie
La ramie ou « ortie de Chine » (la China grass des Anglo-Saxons) est connue depuis l’Antiquité sur plusieurs continents; elle est appréciée pour ses qualités de résistance et sa ressemblance avec la soie. Ainsi Pline l’Ancien écrivait qu’il est parfois difficile de distinguer les vêtements de soie (vestis bombycina) fabriqués avec la matière produite par le bombyx du mûrier de ceux fabriqués avec des fils provenant d’un arbre de l’Inde (la ramie) et qu’on nomme vestis serica. En Extrême-Orient par exemple, elle était utilisée pour l’habillement dans la confection de robes inusables à l’aspect soyeux. Dans l’ancienne Égypte, entre 5 000 et 3 500 ans avant notre ère, la ramie entrait dans la constitution des bandelettes qui servaient à envelopper les momies. Les Indiens d’Amérique l’utilisaient aussi sous forme de ficelles et de lacets pour orner les manches de poignard et de lances. Elle est introduite en Europe au Moyen Âge ; puis, au xixe siècle des filatures sont établies dans divers pays dont l’Allemagne, l’Angleterre et la France.
La plante et sa culture
La ramie est une dicotylédone appartenant à l’ordre des rosales, de la famille des urticacées, genre Boehmeria. C’est une ortie non urticante, ce qui rend son maniement facile. Plusieurs espèces sont utilisées : B. nivea, ou ortie blanche, B. tenacissima et B. utilis, deux orties vertes. La ramie est une plante vivace, de 1,5 à 4 m de hauteur, formée à partir de rhizomes ou tiges souterraines qui donnent naissance à des touffes de tiges portant de larges feuilles.
Selon les espèces, on cultive la ramie sous les climats tropicaux ou subtropicaux, particulièrement en Asie (Chine méridionale dont elle est originaire, Indonésie, Philippines, Thaïlande, Vietnam), mais aussi au Mexique et au Brésil, en Égypte et en Afrique du Nord. La plante peut aussi s’adapter à des climats plus tempérés.
Sa culture ne présente aucune difficulté. Elle se multiplie facilement par semis, bouturage, marcottage ou division du rhizome. La terre doit être légère et riche, fraîche mais non marécageuse. C’est une plante qui aime
l’ombre mais qui supporte très bien la sécheresse. En conditions favorables, elle donne plusieurs récoltes par an (de 2 à 5), la production pouvant atteindre 300 tonnes à l’hectare.
La plante, localisation et caractéristiques
Les fibres de ramie sont localisées en périphérie de la tige, entre l’écorce et les tissus conducteurs. Comme pour le lin et le chanvre, ce sont des fibres périphloémiennes et intraphloémiennes, qui sont groupées en faisceaux. Les fibres élémentaires sont longues (de 3 à 17 cm) et fines (20 à 50 um de diamètre). Ces cellules sont mortes à maturité et présentent la même structure que celle des fibres de lin et de chanvre : paroi primaire fine élaborée pendant la croissance, paroi secondaire épaisse et tripartite, fortement cellulosique (> 80 %), mise en place pendant la phase de remplissage.
Les microfibrilles de cellulose ont une cristallinité élevée. Les fibres sont unies entre elles par une lamelle moyenne de nature pectique. Elles sont dépourvues de lignines.
Les fibres de ramie sont remarquables par leur brillance qui leur donne un aspect lustré comparable à la soie. Constituées de cellulose très cristalline, elles sont aussi très résistantes. Elles possèdent une grande ténacité : un fil de ramie peut difficilement être rompu à la main. Ce sont les fibres naturelles qui présentent le rapport ténacité/finesse le plus élevé; la charge spécifique de rupture est remarquable (70 à 80 cN/tex contre 55 à 60 cN/tex pour le lin et 25 à 45cN/tex pour le coton). Elles montrent une grande résistance au pourrissement et sont donc réputées comme imputrescibles; elles présentent aussi une bonne capacité à absorber l’humidité (de 6 à 12% d’hygroscopie sous 65% d’humidité) et à prendre les teintures.
De la plante à la fibre
L’extraction des fibres à partir des tissus de la tige de ramie est difficile, ce qui a longtemps ralenti son développement commercial. Après un dépelliculage, qui consiste à enlever la partie la plus externe de la tige, il faut procéder à un décorticage et un dégommage poussés. Le décorticage de la matière encore verte ou desséchée s’effectue soit à la main, dans les pays asiatiques où la main-d’œuvre est bon marché, soit par une décortiqueuse mécanique. Le rouissage, tel qu’on le pratique pour le lin ou le chanvre, est une opération difficile, car il demande à la fois des conditions climatiques particulières et le plus grand soin, sans lequel les fibres risquent d’être altérées. Actuellement, un procédé en vase clos, où les tiges sont soumises à l’action de la vapeur ou de l’air chaud, permet de séparer rapidement la chènevotte de l’écorce contenant les fibres qui sont aisément dissociables. Le dégommage permet d’isoler complètement les faisceaux de fibres et d’éliminer les pectines. Il s’effectue industriellement en autoclave, dans l’eau bouillante additionnée de soude ou de savon alcalin. Ces procédés permettent d’obtenir les fibres dans leur longueur, en conservant leur solidité et leur éclat. Après blanchiment, elles apparaissent très blanches et lustrées.
Utilisations et débouches
Les fibres de ramie peuvent être transformées en fils ou cordages, remarquables pour leur solidité. Les fils à coudre peuvent être utilisés pour la maroquinerie, la confection des chaussures, mais aussi pour la confection de filets et de dentelles. Après tissage et teinture, ils sont employés à la fabrication de linge de maison ou à la confection d’étoffes pour l’habillement ou l’ameublement.
Grâce à leurs propriétés d’imputrescibilité et d’absorption, les fibres trouvent un nouveau débouché dans le secteur des textiles alimentaires : égouttage et affinage des fromages et même du caviar. Les fibres de ramie sont aussi présentes dans les billets de banque auxquels elles donnent un « craquant » particulier et une bonne tenue. Enfin, on les trouve souvent en mélange avec d’autres fibres naturelles ou chimiques.
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