La maladie de Creutzfeld-Jakob
La maladie de Creutzfeldt-Jakob est une forme de démence très rare qui se traduit notamment par des troubles de la mémoire, des difficultés à s’exprimer, des troubles visuels ainsi que des troubles de l’équilibre et de la motricité. La mort survient inévitablement dans l’année. Pendant très longtemps cette maladie excessivement rare sera restée une curiosité encyclopédique, jusqu’à ce que les hasards de la science en fassent l’une des maladies les plus célèbres du XXe siècle, sous la forme d’une maladie que l’on appelle aujourd’hui la nouvelle variante de la maladie de Creutzfeld-Jakob.
La découverte de la maladie
Cette maladie est devenue célèbre au cours des années 1960, lors de la découverte d’une maladie cérébrale (l’encéphalopathie), transmissible par cannibalisme dans une tribu de Papouasie-Nouvelle Guinée, puis par la mise en évidence de cas d’encéphalopathie chez des enfants traités avec des hormones de croissance extraites de cerveaux humains, et, finalement, lors de la grande épidémie de vache folle qui a commencé à décimer les troupeaux de bétail en Grande-Bretagne et dans d’autres pays européens à partir des années 1980.
Les hormones de croissance
Après l’observation de la maladie de Creutzfeld-Jakob en Papouasie lors de la consommation et de la manipulation de cerveaux humains, cette maladie devient suspecte en Europe pour un tout autre motif. On a observé en effet, des cas de maladie de Creutzfeld-Jakob chez des enfants traités par hormone de croissance, un traitement révolutionnaire contre le nanisme. Au début, les hormones de croissance étaient obtenues à partir d’extraits de cerveaux de cadavres, et la maladie disparut après la mise au point d’un procédé industriel de production de l’hormone, par génie génétique, comme pour l’insuline. La contamination s’est produite dans les années 1984-1985 (époque ou un millier d’enfants ont été traités), 54 cas de maladie de Creutz- feld-Jakob ont alors été détectés, et tous sont décédés.
La contamination a été également prouvée, dans de rares cas, après greffes de cornée et opérations neurochirurgicales, probablement par contamination des instruments chirurgicaux utilisés.
L’épidémie de vache folle
Quelques années plus tard, à la fin des années 80, apparaîtra la grande épidémie de vache folle – qui est également une encéphalopa- thie spongiforme — en Europe, principalement en Grande-Bretagne, qui a nécessité, et ce jusqu’à aujourd’hui, l’abattage de plusieurs centaines de milliers de têtes de bétail, ce qui n’a pas suffi à empêcher l’apparition de cas de la maladie chez l’homme, à partir de 1985. En 2001, une centaine de cas avait été recensée, presque tous en Grande- Bretagne, et on s’attend à une épidémie beaucoup plus importante, en raison de la durée d’incubation de la maladie, qui peut se déclarer quelque trente ans après la contamination, et bien que l’épidémie de vache folle soit en cours d’éradication.
La contamination
Depuis l’apparition de l’épidémie, les voies de la transmission de la maladie ont été bien établies. La contamination du bétail est due à son alimentation, dans laquelle ont été incorporées des farines animales faites de carcasses de moutons, probablement à l’origine de la maladie. On a incriminé en particulier le traitement de ces farines, et leur insuffisante stérilisation. Cette maladie se propage dans le troupeau, et l’homme se contamine accidentellement par la consommation de viande, et en particulier des abats.
Dans les années 1990, la responsabilité de cette maladie sera attribuée à un nouvel agent infectieux, appelé prion, et dont l’existence a été pendant longtemps l’objet de polémiques.
L’inventeur du prion, Stanley Prusiner, fut récompensé par le prix Nobel en 1997. Le prion est plus petit qu’aucun virus connu, et extrêmement résistant. Cet agent « non conventionnel » a été dénommé « prion » par Prusiner en 1982, pour indiquer sa nature protéique.
La protéine PrPc est un constituant des membranes cellulaires, des neurones en particulier, dont le rôle est inconnu. La forme pathogène de la PrPc est appelée « PrPsc », pour « scrapie » (encéphalopathie spongiforme du mouton, appelée aussi en France « gratte » du mouton). Elle présente une conformation spatiale différente de la PrPc. Elle a tendance à se déposer sous forme de dépôts amyloïdes, caractéristiques des lésions du système nerveux. L’accumulation de la PrPsc évolue parallèlement à la dégénérescence spongiforme des neurones.
Les maladies connues dues au prion sont aujourd’hui, outre le kuru en voie de disparition, la maladie de Creutzfeld-Jakob, le syndrome de Gestmann-Strayssler-Scheinker, l’insomnie fatale familiale, chez l’homme, et, chez l’animal, la scrapie du mouton et de la chèvre, l’encéphalopathie spongiforme bovine et féline, ainsi que d’autres maladies observées chez le vison et certains cervidés.
La nouvelle variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (nv-MCJ)
Diagnostiquée à la suite de l’épidémie de vache folle, la nouvelle variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (nv-MCJ) est également une maladie neurodégénérative humaine rare et mortelle. Comme la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ), elle se classe dans les encéphalo- pathies spongiformes transmissibles (EST) en raison de la dégénérescence spongiforme caractéristique de l’encéphale qu’elle entraîne, et de sa transmissibilité.
Décrite pour la première fois en mars 1996, et contrairement aux formes classiques décrites par Creutzfeldt-Jakob, la nv-MCJ touche de jeunes patients (âge moyen de 29 ans, contre 65 ans), a une évolution plus longue (moyenne de 14 mois au lieu de 4,5 mois) et est associée à l’exposition, sans doute par l’alimentation, à une EST du bétail appelée encéphalopathie spongiforme bovine (ESB).
Les symptômes
Au début de la maladie, les patients souffrent généralement de symptômes psychiatriques qui, la plupart du temps, se présentent sous la forme d’une dépression ou, moins souvent, comme une psychose de type schizophrénique. Des symptômes sensoriels inhabituels, comme la sensation d’avoir la peau « poisseuse », ont été ressentis dans la moitié des cas au début de la maladie. Les signes neurologiques, notamment l’ataxie (manque d’équilibre), les difficultés de la marche et les mouvements involontaires se développent à mesure que la maladie progresse et, au moment du décès, les sujets deviennent totalement immobiles et muets.
Le diagnostic
Le diagnostic est fait devant le tableau clinique, la nature évolutive du mal et l’impossibilité de faire un autre diagnostic. Il n’existe pas de test diagnostic totalement fiable avant l’apparition des symptômes cliniques. Néanmoins, les examens en résonance magnétique et les tests sur le liquide céphalorachidien pourraient s’avérer utiles. Seul l’examen anatomopathologique du cerveau permet actuellement de confirmer le diagnostic de la nv-MCJ.
On connaît encore mal l’extension possible de la maladie, car la période d’incubation pourrait atteindre 30 ans, ce qui signifie qu’il pourrait y avoir une explosion de cas de nv-MCJ dans les prochaines décennies. D’autre part, si la contamination la plus probable est liée à l’alimentation, la transmission par le sang a été également prouvée, y compris entre la mère et l’enfant. Certains pays ont déjà réglementé sévèrement la transfusion sanguine et même interdit l’utilisation de sang de personnes ayant séjourné dans les pays à risques.
La prévention
Comme il n’existe pas de traitement possible jusqu’à présent contre cette maladie, la seule mesure concrète consiste à interdire le plus possible la consommation et l’exportation de viandes susceptibles d’être contaminées.
Il existe un risque de transmission des agents des EST animales par les vaccins humains ou vétérinaires, préparés sur du matériel bovin. L’industrie pharmaceutique devrait de préférence éviter d’utiliser du matériel bovin ou du matériel provenant d’autres espèces animales chez lesquelles des EST surviennent naturellement. S’il est absolument nécessaire, le matériel bovin doit provenir de pays qui ont mis en place un système de surveillance de l’ESB et qui notifient aucun cas ou seulement des cas sporadiques d’ESB. Ces précautions s’appliquent également à la préparation des produits cosmétiques.
Certains médicaments seraient susceptibles d’améliorer considérablement l’état des malades porteurs de nv-MCJ : la quinacrine, médicament contre le paludisme utilisé depuis les années 1930 et la chlorpromazine (Largactil), qui est le premier remède neuroleptique, mis au point dans les années 1950.
Vidéo: La maladie de Creutzfeld-Jakob
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