Une variété de matières premières : D’autres matières à papier
Actuellement, on considère que 5 % du papier dans le monde est fait à partir de fibres naturelles autres que celles du bois. On peut les classer en différentes catégories : les plantes annuelles, les sous-produits de ces plantes et les fibres synthétiques ou minérales.
Les plantes annuelles
Ce sont, par exemple, l’alfa en Afrique du Nord et dans la péninsule Ibérique, les roseaux dans le delta du Danube, les bambous en Asie, le kénaf des pays tropicaux.
Stipa tenacissima L. est une poacée vivace originaire du nord de lAfrique et du sud de l’Espagne. Elle est très répandue sur les hauts plateaux arides, en particulier ceux d’Algérie où la plante couvre 450000 hectares. Les feuilles contiennent un tissu fibreux fait de types cellulaires variés occupant toute l’épaisseur du limbe. C’est l’abondance de ces fibres qui fait de ces feuilles un matériau recherché en papeterie, mais aussi pour la fabrication locale de nattes, chapeaux, sandales, cordages ainsi que pour la vannerie.
La fibre d’alfa contient 35 à 40 % de cellulose, 20 à 30 % d’hémicelluloses et moins de lignines que le bois (17 à 19 %). Les fibres sont courtes (de l’ordre de 1 mm de long), étroites (9 [um de large en moyenne) et souples.
Le papier d’alfa est souple, soyeux, résistant, très léger et prend bien les caractères d’imprimerie. L’alfa sert à la préparation de pâtes blanchies. Mélangé en proportions variables à d’autres fibres de résineux et de coton, il peut donner des combinaisons de pâtes de grande qualité pour la fabrication de papier d’impression-écriture de luxe.
Les bambous: Ce sont des poacées qui ont la caractéristique de pouvoir atteindre une très grande taille, de l’ordre de 20 m, voire exceptionnellement 40 m. En Chine, avant l’invention du papier, le bambou était utilisé directement comme support d’écriture. Il était coupé dans sa hauteur en longues lamelles, assez larges pour y tracer des colonnes de caractères. Les lamelles reliées entre elles formaient des sortes de livres très encombrants, nécessitant parfois des charrettes pour leur transport. Les premiers billets de banque émis furent imprimés en Chine sur des papiers à base de bambous. Avec l’invention du papier fait à partir de pâte, le bambou reste souvent utilisé soit seul, soit généralement mélangé à d’autres fibres, telles celles du mûrier ou du chanvre, la paille de riz, le bois de santal, le rotin, le cocon de soie… De nos jours, les bambous sont exploités dans de nombreux pays comme le Pakistan, la Birmanie, la Malaisie, les îles Philippines. Les fibres de bambous sont encore utilisées dans des papiers exotiques ou certains papiers spécifiques tels les filtres à café dits «écologiques». Depuis peu, elles sont utilisées aussi dans l’industrie textile (vêtements tricotés ou tissés).
Les roseaux: Ce sont d’autres poacées également utilisées comme source de fibres. Le terme «roseaux» recouvre plusieurs types de plantes, les cannes de Provence (Arundo sp.), les roseaux des étangs (Phragmites sp.), les plumes des pampas (Gynérium sp., Cordateria sp.). Les roseaux envahissent les zones marécageuses à une vitesse impressionnante aux dépens de toute autre végétation.
Leurs fibres sont pauvres en lignines (de i8 à 22 %), ce qui est un avantage en papeterie et justifie leur utilisation dans des pays au faible couvert forestier, comme la Roumanie et l’Égypte.
Le kenaf: Hibiscus cannabinus L. est une malvacée à croissance rapide répandue dans les zones tropicales de nombreux pays (Afrique, Inde, Asie, Proche-Orient, Amérique latine). Il peut atteindre sa maturité en 120 jours et donne naissance à des cannes minces et hautes.
Le kénaf peut donner 25 tonnes de fibres sèches à l’hectare, neuf fois plus que le bois. Cette source de fibres semble prometteuse comme alternative aux fibres de bois. La fibre est très résistante à la traction, à l’éclatement et à la déchirure. Le kénaf est utilisé dans la fabrication des papiers à cigarette, des mouchoirs en papier, des non-tissés et des papiers sulfurisés. Une première usine de papier journal de kenaf a été construite au Texas (États-Unis).
Le chanvre: Cannabis sativa L. fournit depuis très longtemps de la pâte à papier. On rapporte même qu’un fragment de papier trouvé dans une tombe chinoise datant du Ier siècle av. J.-C. est fait de fibres de chanvre broyées et désagrégées. Utilisé surtout pour ses propriétés textiles, le chanvre a été abandonné aux dépens d’autres fibres, apparemment plus nobles et moins onéreuses.
Aujourd’hui, le chanvre est à nouveau exploité et les étoupes et déchets filamenteux sont employés en papeterie pour la fabrication de certains papiers spéciaux, papier bible, papier à cigarette, papier pour emballages alimentaires.
Les sous-produits de plantes utilisées en agriculture
Les sous-produits utilisés en agriculture sont les bagasses et les pailles. Les bagasses sont des sous-produits des cannes à sucre après leur traitement dans les sucreries. Les résidus fibreux sont obtenus après extraction du saccharose contenu dans la moelle. Les fibres sont courtes, de 0,8 à 2,8 mm. Les bagasses sont utilisées surtout dans les pays où la canne à sucre est exploitée industriellement (Antilles, Mexique, Espagne, Afrique du Nord, Inde).
La bagasse sert à la préparation de pâtes chimiques écrues ou blanchies, entrant principalement dans la composition de cartons, de mouchoirs et serviettes en papier, de papier cristal, mais aussi pour des papiers d’impression- écriture. Le rendement est assez faible, car la plante est très riche en eau et la tige encombrée d’une moelle importante dont il faut se débarrasser.
Les pailles proviennent des céréales (paille de blé, de seigle, de riz). Les fibres sont plutôt des fibres courtes, de 1,2 à 1,5 mm en moyenne. Elles sont assez fines (de 7 à 15 |um de large) et ont une teneur assez basse en lignines (de 12 à 19 %).
En France, on utilise surtout les pailles de blé et de seigle, qui donnent des pâtes ayant un bon épair et une bonne compacité; elles servent en cartonnerie. En Italie, les pailles servent à la préparation de pâtes alcalines écrues ou blanchies et entrant dans la composition des papiers cannelures et des papiers spéciaux.
L’idée de faire du papier à partir de fibres synthétiques reste encore une hypothèse de recherche. Il s’agit de faire des papiers à l’aide d’éléments insensibles à l’humidité soit des fibres synthétiques, comme le Lilion, le Rilsan, le Dacron, soit des fibres minérales, comme les fibres de verre. Actuellement, quelques fibres synthétiques sont utilisées pour certains papiers sécurisés : les billets de banque ou les chèques. Les fibres synthétiques et minérales joueront sans doute un rôle important à l’avenir compte tenu des propriétés qu’elles peuvent conférer aux papiers: le Dacron apporte une grande résistance aux pliures; la fibre de verre des propriétés d’imputrescibilité.
Vidéo : Une variété de matières premières : D’autres matières à papier
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