Machine climatique : Facteurs Géologiques
Des changements climatiques
Imaginons une éruption volcanique qui répandrait des laves sur une surface égale à cinq fois la superficie de la France et ce, pendant plusieurs millions d’années… On entrevoit les conséquences sur le climat mondial ! Or cela s’est produit jadis.
Les trapps sont de gigantesques éruptions effusives de laves basaltiques. Le mot « trapps » signifie en néerlandais et en suédois, « escalier », car les épanchements se superposent, parfois pendant des centaines de milliers d’années ; les processus érosifs font alors le reste, façonnant dans les laves solidifiées des escaliers géants. Cela s’est produit au cœur de l’extinction en masse dite du « Permien-Trias », il y a 252 millions d’années, lorsqu’au cours de la plus grande catastrophe climatique connue à ce jour, la vie a failli disparaître de notre planète : entre 80 et 95 % des espèces terrestres et marines disparurent. C’était à l’interface du paléozoïque et du mésozoïque (respectivement les ères « primaire » et « secondaire », ainsi que l’on disait il y a quelques décennies).
Aujourd’hui encore, ces trapps gisent sous les neiges et les végétations de la Sibérie, entre l’Ob et la Léna, sur une surface de 2,5 millions de kilomètres carrés (environ cinq fois la superficie de la France) et sur une épaisseur de 3 000 m. Le réchauffement consécutif et la pollution due aux émanations gazeuses a vraisemblablement eu des effets localement destructeurs.
Mais les cendres volcaniques qui accompagnent ce genre d’épanchement ont sans doute gravement altéré le climat global de la planète. En effet, l’émission basaltique s’est étendue sur presque un million d’années rejetant dans l’atmosphère 2,5 millions de kilomètres cubes de cendres volcaniques. Certains chercheurs avancent le chiffre de 3 millions de kilomètres cubes. Or les 1 à 2 km3 de matières volcaniques rejetées lors de l’éruption du volcan de Mount Saint Helens (États-Unis, État de Washington) en 1980, ont provoqué sur la Terre un refroidissement perceptible pendant plusieurs mois. On imagine l’ampleur d’une catastrophe causée par des rejets plus d’un million de fois supérieurs. Pire : l’hiver volcanique provoqué par les poussières et les cendres aurait pu être suivi par un réchauffement brutal consécutif à l’émission de gaz à effet de serre émis par la lave en fusion.
Il y a eu également des trapps, au Indes, dans le Deccan, il y a 65 millions d’années lors de la fameuse catastrophe du Crétacé tertiaire, qui vit disparaître les dinosaures. On n’en connaît pas la cause mais certains géologues se demandent si les impacts de très gros astéroïdes, comme celui, plus massif que le mont Everest, qui frappa la Terre au large du Yucatan à cette période, ne pourraient pas déclencher ces phénomènes cataclysmiques. En tout cas, beaucoup de scientifiques considèrent que l’astéroïde du Yucatan ne suffit pas pour fournir une explication satisfaisante de l’extinction en masse du Crétacé tertiaire, mais qu’il convient aussi de tenir compte des épanchements basaltiques du Deccan.
L’astronome, spécialiste des paléoclimats Alfred Lothar Wegener (1880-1930) est à l’origine de la théorie de la tectonique des plaques. Il fut le premier à émettre l’idée de la « dérive des continents », selon laquelle les continents seraient des parties refroidies du magma, qui flotteraient et dériveraient sur celui-ci. Cette hypothèse rendait assez bien compte de ce que suggèrent par exemple, les formes « emboîtables » de la côte ouest de l’Amérique du Sud et de la côte est de l’Afrique : au cours du Permien (entre – 295 et – 255 millions d’années), la « Pangée », un supercontinent flottant sur la « Panthalassa » se serait dissocié en continents distincts.
On voit ce que doit la « tectonique des plaques » à la pensée de Wegener : les nappes du manteau supérieur qui surgissent au niveau des failles des dorsales océaniques se répandent de part et d’autre de ces failles, lesquelles peuvent donc être considérées comme d’immenses volcans linéaires. Ces matériaux du manteau disparaissent ensuite sous les continents ou des arcs insulaires formant bordures
(comme les îles Aléoutiennes, ou les îles Éoliennes en Méditerranée). On nomme « zones de subduction », les zones où les plaques provenant des failles s’enfoncent sous les plaques continentales. Ces mouvements sont souvent comparés à ceux des tapis roulants : les continents ne « dérivent » pas comme le pensait Wegener, ils se déplacent avec la couche supérieure du manteau à laquelle ils sont ancrés.
Les zones de subduction, provoquent des plissements de la plaque sous laquelle disparaît les matériaux engloutis dans le manteau. Ainsi, les montagnes Rocheuses et la Cordillère des Andes se sont-elles formées par subduction de la plaque Pacifique sous la plaque américaine. Le volcanisme dans les zones de subduction représente deux tiers des volcans actifs. C’est un volcanisme souvent explosif et qui peut avoir des conséquences non négligeables sur le climat de la Terre. L’éruption du volcan de Mount Saint- Helens, au sud de Seattle, est liée à la subduction de la plaque Pacifique et de la plaque de Juan de Fuca sous la plaque nord-américaine.
Pourtant il est encore d’autres facteurs à prendre en compte si l’on veut saisir l’ensemble des paramètres qui gouvernent les changements du climat de notre planète. Ils seront ici simplement évoqués, n’étant pas immédiatement à l’ordre du jour et ayant fait, de surcroît, l’objet de développements plus importants dans un ouvrage précédent.
Ainsi, les variations de l’activité solaire représentent aussi un facteur qu’il convient de prendre en compte. Il y a quatre milliards d’années, la luminosité du Soleil était de 25 % inférieure à ce qu’elle est aujourd’hui. Comme beaucoup d’assertions fantaisistes sont colportées en cette matière, dans les médias et sur l’Internet, notamment. Il convient de faire sereinement le point.